«LA COMPÉTITION FAIT PARTIE INTÉGRANTE DE NOTRE FUTUR»

David King occupe le poste de vice-président en charge des opérations spéciales et du motorsport chez Aston Martin. S’appuyant sur son expérience en compétition, des autos au tempérament plus affirmé devraient voir le jour.

RA: La gamme actuelle Aston Martin, «vieillissante», va être graduellement remplacée par de nouveaux modèles dans les mois à venir. Quelle est la nouvelle philosophie?

David King: Je ne suis pas d’accord avec vous. Nos voitures sont toujours très compétitives. Au cours des 2 à 3 dernières années, nous avons développé des voitures plus radicales, la GT8 et la GT12, sur la base de la Vantage. Toutes deux répondent au souhait de notre clientèle de disposer de modèles particulièrement performants sur circuit. Comme il devient de plus en plus difficile d’exploiter le potentiel de nos voitures sur route ouverte, il s’est créé une niche dans laquelle nous sommes entrés. Où je vous rejoins en revanche, il est vrai que l’ennemi de la performance c’est le poids; nous travaillons actuellement d’arrache-pied dans ce domaine.

Parmi ses attributions, David King coordonne le développement de la Walkyrie en collaboration avec Red Bull Racing. © P. Corminbœuf

Comment allez-vous diminuer le poids de vos véhicules? Allez-vous opter pour le carbone?

Pas à grande échelle. L’aluminium est un matériau fantastique, pas beaucoup plus lourd que le carbone. En revanche, il est facile à étudier, former et travailler et son comportement est connu. Il reste, pour nos voitures de route, le meilleur choix pour notre plateforme. Comme tous les autres constructeurs, nous avons aussi la compétence pour développer et construire une structure en carbone. Ce fut le cas pour la monocoque de la One-77 et le sera pour la Walkyrie. Nous utilisons aussi les composites pour les panneaux de carrosserie de nos séries spéciales. Il offre une flexibilité accrue pour les modifications de style sur de petits volumes, en raison du procédé de fabrication relativement simple à mettre en place (moules). Pour les GT8 et GT12, nous avons également utilisé le titane pour la ligne d’échappement par exemple. Voici globalement les moyens que nous avons pour réduire le poids sur une plateforme existante. En revanche, pour les nouveaux modèles, nous cherchons dès leur conception à optimiser la masse. Grâce à l’utilisation intensive de carbone et titane, la Walkyrie devrait peser moins de 1000 kg, un vrai challenge pour une motorisation V12. Je considère que le carbone n’est pas la réponse à toutes les questions relatives au poids d’un véhicule. Suivant l’application, l’aluminium, voire l’acier, conviennent mieux.

La DB11 a inauguré un V12 turbocompressé et le successeur de la Vantage héritera d’un V8 biturbo. Allez-vous utiliser des solutions hybrides ou électriques à l’avenir?

Dans le cadre de notre partenariat avec Daimler, nous allons effectivement bénéficier du V8 biturbo d’origine AMG pour la gamme qui succèdera à la V8 Vantage. A mon sens, les moteurs hybrides ne sont pour l’heure qu’une transition vers une électrification complète des véhicules. Leur rôle est important pour l’industrie, mais n’est chez nous pas d’actualité, sauf pour la Walkyrie qui sera effectivement propulsée par un V12 hybride. Par contre, nous travaillons depuis plusieurs mois sur une Rapide 100% électrique.

En devenant électrique, est-ce que la Rapide ne va pas perdre une partie de son âme?

L’électrification est un challenge pour tous les acteurs de notre industrie. Le risque, en n’y prenant pas part, est que nous perdions l’opportunité de rester compétitifs. L’important pour nous n’est pas de devenir leaders dans ce domaine, mais de rester au fait de ce qui se pratique et comprendre ces nouvelles technologies. La Rapide électrique ne va pas devenir d’un seul coup la meilleure voiture de son segment, mais elle permet à nos ingénieurs de se familiariser avec cette technologie et à notre marketing de comprendre les besoins de la clientèle de cette niche avant que nous prenions un engagement plus marqué dans cette direction sur le long terme. C’est en quelque sorte un exercice grandeur nature. Ce qui est par ailleurs intéressant, c’est qu’une partie de notre clientèle attend avec impatience l’arrivée de cette Rapide électrique.

Quelle approche adoptez-vous pour la conduite autonome?

La conduite autonome paraît incongrue chez un constructeur de voitures de sport. Si elle devient obligatoire par la législation ou nécessité, nous serons bien obligés de nous y adapter. Mais nous ne conduisons pas nos propres recherches dans ce domaine. Et puis les systèmes vont évoluer très vite. Grâce à notre partenariat avec Daimler, nous sommes en mesure d’avoir accès à toute la technologie nécessaire. Cependant, je pense que la conduite autonome créera une demande pour une vraie expérience de conduite. Lorsque vous serez sur le chemin du travail, dans votre auto qui conduit toute seule, en train de pianoter sur votre smartphone, où retrouvez-vous le plaisir de conduire?

La ligne AMR, lancée au dernier Salon de Genève, puise son inspiration et ses technologies dans la compétition.

Donc Aston Martin restera un fabricant de voitures qui distillent des émotions?

Nous sommes connus pour produire parmi les plus belles et enthousiasmantes GT du monde. Nous lançons prochainement notre SUV. Plus que jamais nous souhaitons que nos voitures soient conduites et procurent du plaisir. C’est d’ailleurs dans cette optique que nous avons créé la Vulcan. Vingt-quatre exemplaires d’un chef-d’œuvre vendu très cher et utilisable uniquement sur circuit. Que recherchent les clients qui en ont fait l’acquisition? Le fait de posséder une auto plus exclusive qu’une «simple» voiture de course. Cela a permis aussi de changer un peu l’image de notre marque et le projet Walkyrie s’inscrit dans la même lignée. Depuis plus de 10 ans, nous avons acquis une solide expérience en compétition. Le lancement de la marque AMR que nous avons présentée au dernier Salon de Genève en est la déclinaison presque naturelle. Quoi de plus gratifiant pour un client que conduire sur la route une voiture qui ressemble à une voiture de course et que l’on voit chaque week-end sur les circuits? La compétition fait partie intégrante de notre futur. Ce n’est plus un secret que nous allons prochainement remplacer la Vantage. A cette occasion, nous aurons l’opportunité de créer quantité de déclinaisons axées sur la performance.

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