A quelles marques pensez-vous quand on vous dit «milieu de gamme supérieur »? Probablement d’abord aux fabricants allemands. Puis, peut-être, à Volvo, Maserati, Lexus… Et Renault? Les Français ne sont probablement pas les premiers sur la liste. Une hypothèse que l’on peut vérifier par les statistiques d’immatriculation des voitures particulières neuves en Suisse: la Mercedes Classe E, la BMW Série 5 et l’Audi A6 sont clairement en tête dans le segment des berlines raffinées, avec la Volvo S90 qui suit de loin. Quant à la Renault Talisman, elle n’a été immatriculée que 535 fois l’an dernier, et la tendance est à la baisse. Le constructeur français est fermement décidé à contrer cette tendance avec l’introduction de nouveaux moteurs. Avantages annoncés, plus de puissance, ainsi qu’une pleine conformité à la norme Euro 6d-Temp sur les émissions de gaz d’échappement. La mission est simple, en particulier pour la Talisman en exécution haut de gamme S-Edition (dès 46 600 francs) ou Initiale Paris (dès 47 100 francs): atteindre des sommets d’agrément, que ce soit dans le trafic aux heures de pointe, sur la route d’un col de montagne ou lors d’une sortie familiale, le tout en donnant la réplique à sa récente rivale et compatriote, la Peugeot 508 GT.
Un ensemble cohérent
Le nouveau moteur à essence de la Talisman est une vieille connaissance. Fort de 225 chevaux et 300 Nm de couple, le 4-cylindres turbo provient de l’Alpine A110 et de la Mégane RS (outre l’Espace depuis l’été 2017). Comme ce dernier, la monte du bloc 1,8 l permet à la berline au losange de revendiquer une hausse de 25 ch et 40 Nm. Du côté des moteurs à autoallumage, l’offre existante n’a pas encore bénéficié d’une éventuelle mise à jour, contrairement à l’Espace. Dans le monospace, les 1,6-l et 2-l diesel délivrent respectivement 160 ch/360 Nm et 200 ch/400 Nm. Tous deux sont couplés avec une boîte à double embrayage à 6 rapports capable de supporter leur couple élevé, tandis que la Talisman embarque toujours une unité à 7 vitesses. En matière de design, de qualité perçue et d’équipements, Renault n’a cessé de progresser. En 2015, la Talisman a même été élue «plus belle voiture de l’année» à Paris. Dans la version Initiale Paris, les équipements de série tels que les sièges chauffants et massants ou le cuir nappa s’accompagnent de moult raffinements techniques, à commencer par les roues arrière directrices (4 Control). Conjointement avec sa cure de performances sous le capot, la Talisman a donc tout pour réaffirmer ses ambitions sur le marché.
Vie de château
Nous sommes allés nous en assurer sur un parcours d’essai organisé autour du Château de Pontarmé, près de Paris: le cadre idéal pour la Talisman, disponible en berline 4 portes ou en break 5 portes («Grandtour»). Dans les rues étroites qui bordent la propriété, la direction aux quatre roues donne l’impression d’être assis dans un véhicule beaucoup plus compact. Les suspensions pilotées assurent un confort agréable, sans pour autant pêcher par une souplesse excessive. Du moment que le mode de conduite ne soit pas sportif, la boîte de vitesses à double embrayage fait son travail avec délicatesse et sérénité, autant en ville que sur les routes de campagne. Il en va de même pour l’Espace, bien que pour lui, le mode Sport soit davantage théorique que réel. Les 4,85mètres de long, 2,1mètres de large et 1,8tonne du lourd sept places vous rappellent toujours que votre belle-mère pourrait être assise sur la deuxième rangée. A la sortie d’un rondpoint, le monospace a du mal à juguler l’avalanche de couple des blocs diesel, dont l’étonnante spontanéité à tous les régimes incite à appuyer plus que de raison sur le champignon. Toutefois, si l’on revient à un rythme adapté au cahier des charges du véhicule, la critique s’efface aussi vite que les suspensions adaptatives se règlent. Facile à appréhender lors des manoeuvres malgré son imposant volume, le monospace français ne posera aucun problème pour se garer au moment des courses hebdomadaires. S’il faut vraiment doter l’Espace d’un tempérament excité, le moteur 1,8 l est le plus adapté de la gamme et saura redonner le sourire aux pères de famille nostalgiques des folies de leur jeunesse. Vous avez dit cliché?
Et la traction intégrale?
Seul modèle de l’ancienne régie pouvant être doté de quatre roues motrices, le Koleos joue la même partition. Alors que d’autres SUV roulent des mécaniques, il se concentre sur l’essentiel et n’obtient donc pas un nouveau moteur, mais une transmission à variation continue. Appelée à remplacer l’unité manuelle, la boîte X-Tronic équipera le Koleos de série. Conséquence directe, le moteur diesel de 2,0l perd un peu de son calme, mais avec 177 ch et 380 Nm, il dispose néanmoins d’assez de souplesse pour ne pas s’envoler vers des régimes inutiles. En combinaison avec sa garde au sol généreuse (210 mm) et des angles de pente adaptés, le SUV français ne rechigne pas non plus à une utilisation tout terrain performante. Revenons à la Talisman: on saura gré à Renault du fait que les cinq modes de conduite sélectionnables de série («Multi-Sense») modifient réellement le comportement du véhicule. Sur les longues courbes, le mode Sport rend la berline un rien nerveuse en raison des changements de rapport effrénés et de la direction rendue trop directe. Pour pouvoir exploiter la veine sportive de la Talisman, il faut des virages serrés en épingle à cheveux, où les roues arrière directrices font merveille. Dans l’ensemble, en bonne traction civilisée, la Talisman observe plutôt un sous-virage de bon aloi. Cela ne l’empêche pas de montrer les crocs aux propriétaires de berlines rivales au feu rouge et ce, grâce à un temps d’accélération de 0 à 100 km/h annoncé à 7,5 secondes. Ainsi parée, la Talisman passe avantageusement du rôle de voiture décontractée à celui de loup déguisé en agneau. C’est exactement ce que l’on demande à une voiture du «milieu de gamme supérieur », avec un avantage financier évident sur la concurrence.
Text: Cedric Heer