Une vitesse de navette spatiale et des sensations de conduite invraisemblables. En une seule phrase, l’exercice du test automobile serait terminé, dans le cas de la McLaren 720S. Alors qu’ajouter de plus? Au volant de cette supercar anglaise, on se sent comme le baron von Münchhausen – surnommé le baron du mensonge – sur son boulet de canon. Et encore, il faudrait réactualiser la vitesse du projectile. Suite au passage d’un simple turbo à la technologie à double entrée, la distribution de la puissance est devenue très uide. Plus trace du moindre temps de réaction, ça pousse tout de suite et ça ne s’arrête plus. Les 100 km/h sont atteints en 2,9 secondes, la barre des 200 km/h est franchie 5 secondes plus tard et il ne faut pas plus de 21 secondes pour se retrouver à 300 km/h. Si une 720S était lancée à sa vitesse maximale de 342 km/h, le déplacement d’air produit aurait tendance à souf- er les imprudents postés sur son passage. Heureusement, ce type d’événement est assez rare, à moins que vous ne soyez un adepte des promenades au bord des pistes.
Design affûté
Notre anglaise se tient là, les bras – comprenez, les portes – grands ouverts. Des ouvrants en élytre, qui se dressent vers le ciel comme les ailes d’un oiseau. Elles sont caractéristiques de la marque, mais dans le cas particulier, elles paraissent plus acérées encore que d’habitude. La 720S est construite sans concession aucune pour la performance. Cette supercar repose sur un châssis monocoque en bre de carbone, surnommé Monocage II, assurant rigidité et légèreté. Le toit escamotable s’ouvre et se referme en onze secondes. Et si vous êtes prêt à débourser plus de 10 000 francs pour du verre électrochrome, vous pourrez surteinter le pavillon du Spider le plus rapide de la gamme ou laisser la lumière pénétrer dans l’habitacle sans même ouvrir le toit. Car ce hardtop rétractable passe du sombre au transparent par simple pression sur un bouton.
1,8 kg par cheval…
A l’arrière, les deux puissantes sorties d’échappement ressemblent à des lance-roquettes. Derrière les larges grilles de sortie d’air, vous pouvez distinguer des éléments du différentiel et de la transmission. Le diffuseur n’a pas une simple fonction esthétique, chacune des lames dont il est composé vise à améliorer l’appui aérodynamique, optimiser la résistance de l’air et assurer le bon refroidissement de tous les éléments mécaniques. Imaginez un moteur V8 biturbo exerçant sa puissance de 720 ch et son couple de 770 Nm sur un fétu de paille pesant 1300 kilos à peine. Ce potentiel démoniaque, exercé exclusivement sur le train arrière – la traction intégrale n’est pas à l’ordre du jour –, devrait avoir pour effet de faire cirer les roues motrices. Et, pourtant, ce n’est pas le cas, tant l’appui est ef cace.
Châssis impressionnant
Le niveau de motricité de la McLaren 720S est stupé ant, en vertu du châssis qui transmet immédiatement le couple là où il est nécessaire. L’accélération des roues et la pression dans les amortisseurs sont mesurées par différents capteurs sur les fusées d’essieu et les amortisseurs. Ces données sont utilisées pour évaluer l’état du revêtement et le système adopte des réglages adaptés à chaque situation. Il est néanmoins recommandé, lors des premières accélérations en sorties de courbes, d’en garder un peu sous le pied a n de ne pas susciter la colère des dieux de l’Olympe. Ceci d’autant plus que la moindre sollicitation de l’accélérateur se traduit par un déchaînement violent, et que la direction est tout aussi directe. Questionné sur ce qu’il pensait de la McLaren 720S, l’ancien champion du monde de formule 1, Fernando Alonso, a répondu: «Cette voiture fait vraiment plaisir. Au professionnel comme au conducteur moins expérimenté. » Vous l’avez compris, il n’y a pas besoin d’être un champion du monde de F1 ou d’Endurance pour rouler vite en 720S. L’électronique est là pour vous assister, mais elle n’est pas intrusive. A la moindre pression sur la pédale de frein, les puissants disques en carbone-céramique produisent des décélérations dantesques, l’aileron arrière relevé jouant en plus le rôle d’aérofrein et stabilisant la voiture. Il faut appuyer fort pour faire intervenir l’ABS, dont la régulation est parfaite. Et dans les virages, les G atteints dépassent fréquemment le seuil de tolérance de certains estomacs. Imaginez qu’à 100 km/h, la voiture s’immobilise sur 30 mètres. A 200 km/h, il faut environ 120 mètres et 4,5 secondes à la supercar britannique pour s’arrêter totalement. Avec cette voiture, comme souvent dans la vie, il est toujours facile d’aller trop loin. C’est ce que Lando Norris, pilote de formule 1 McLaren, a vécu récemment lorsqu’il a atterri dans un bac à gravier du circuit de Silverstone. Il était accompagné de son compatriote Johnny Herbert qui, au même moment, commentait la puissance, le son, le drift, les forces G et les qualités dynamiques de la 720S, en criant: «Max Verstappen, tu devrais voir, c’est comme cela qu’on pilote cette voiture!» Le châtiment divin fut immédiat. Comme quoi la ré exion et un peu d’humilité ne sont pas mauvaises conseillères avant d’appuyer sur le bouton de démarrage d’une McLaren 720S.
Quelques restrictions au quotidien
McLaren promet aussi que cette supercar peut se plier à un usage quotidien. Pour la rendre aussi civilisée que possible, il suf t de mettre le bouton rotatif à trois positions en mode Confort. Les généreuses surfaces vitrées procurent une visibilité périphérique très correcte, les autres «données de vol» importantes étant fournies par un écran d’infodivertissement de 8 pouces. A cela s’ajoutent des commandes conviviales et réduites à l’essentiel. On est très bien assis dans les profonds baquets et le niveau sonore ne pose pas de problème en circulation urbaine. C’est évidemment autre chose sur route, mais nul ne s’en plaindra. Même remarque pour les suspensions, qui ne garantissent pas un confort parfait sur les revêtements dégradés, mais conviennent sur des routes et autoroutes bien entretenues. Reste la question des parkings. Ceux situés en surface ne sont pas toujours adaptés et les souterrains le sont encore moins. Heureusement, l’automobile – à l’instar des enfants – a parfois aussi une composante sociale. Où que vous alliez en McLaren 720S, vous n’aurez pas de mal à nouer des contacts. Que ce soit avec la caissière de la stationservice, le couple rencontré devant un centre commercial ou l’amateur de voitures de sport.