Peu importe le véhicule qu’il teste, le journaliste automobile se doit de faire abstraction de tout sentiment de culpabilité et apprécier l’engin pour ce qu’il est, et non pas pour ce qu’il représente. Et ce, même s’il s’agit d’un SUV tout à la fois lourd, puissant et haut de gamme. Mais le travail du journaliste est facilité lorsque ledit SUV affiche quelques avancées en matière de respect de l’environnement, comme c’est par exemple le cas ici; deuxième dans la hiérarchie Range Rover, le Sport compte de nombreux fidèles dans notre pays. Lancée dans le sillage de la variante hybride rechargeable, cette version «mild hybrid» démontre la volonté des Britanniques de Coventry de se lancer corps et âme dans l’électrification.
Le ramage à la hauteur du plumage
Cette variante Sport est-elle, comme son nom l’indique, une sportive? Voyons d’abord ce qui se cache sous le grand capot de ce mEHV (mild hybrid electric vehicle): protagoniste principal, le dernier-né des moteurs de la famille Ingenium, en l’occurrence un 6-cylindres en ligne, remplace l’ancien V6. Donné pour 400 ch, ce bloc inédit est fabriqué dans la nouvelle usine de moteurs Jaguar Land Rover de Wolverhampton. Réservé pour l’heure à l’usage strict du HST, il se démarque par son turbocompresseur à double entrée ainsi que sa commande levée de soupapes variable. A l’usage, ce dernier s’est révélé très performant, avec un temps de réponse quasi nul. Le mérite revient au compresseur à entraînement électrique, travaillant différemment en fonction de la position de l’accélérateur et capable d’atteindre une vitesse de rotation de 120 000 tr/min en à peine une demi-seconde. Quant à l’hybridation douce, elle passe complètement inaperçue. Celle-ci repose sur un système stop-start de conception somme toute classique puisqu’il a pour cœur un alterno-démarreur intégré, entraîné par courroie et fonctionnant sous une tension de 48 volts. La récupération d’énergie intervient sitôt que la voiture décélère. En sus, le moteur se coupe dès l’arrêt du véhicule. L’énergie stockée dans la batterie de 48 volts en phase de ralentissement est restituée au démarrage, et ce afin d’aider ce tout-terrain à se mettre en mouvement.
Outre son rôle de stimulateur cardiaque, le système hybride permet d’économiser un peu de carburant. A ce propos, la voiture d’essai a brûlé 11,7 l de sans-plomb aux 100 km en usage mixte incluant de la ville, des routes secondaires et des trajets fluides sur autoroute. Au vu des 2,5 tonnes du Range Sport, le terme «économique» n’est donc pas trop galvaudé. Notons enfin que le Range Rover normal (millésime 2020) bénéficiera également de ce groupe motopropulseur Ingenium peu énergivore.
Machine à rouler
Une fois toutes les commandes électroniques – nouvelles pour certaines – assimilées et activées, le conducteur peut se consacrer à 100% à la conduite. Perché tel un stratège au sommet de sa butte, le conducteur de Range se rend bien vite compte qu’aucune autre voiture n’est capable de tenir la comparaison avec sa monture; pour paraphraser les propos d’un journaliste coutumier d’un langage fleuri, comparer un Range Rover à ses rivaux de segment, c’est comme comparer Buckingham Palace à la case de l’oncle Tom. En disant cela, l’homme se référait surtout à l’habitacle, qui est tout à la fois noir et classieux, comme en témoigne l’alcantara «Premium Velours» qui recouvre le ciel de toit, les montants ainsi que la jante du volant. Doux au toucher, ce matériau proche du daim est chaud, a fortiori lorsque le chauffage du volant fonctionne. Subsiste la question de sa résistance à la transpiration et au frottement. Dans tous les cas, la direction procure un grand plaisir et la position de conduite surélevée libère une vue magistrale sur le trafic. La régulation adaptative de la vitesse garantit une grande quiétude dans les embouteillages, permettant au passage d’apprécier à sa juste valeur le confort des fauteuils. A l’image de ce dernier, le sentiment de sécurité est tout aussi manifeste. Malheureusement, il arrive que la voiture qui précède ralentisse sur sa voie avant de sortir vers une aire de service, provoquant immanquablement le freinage du Range qui prend ensuite son temps pour remonter aux 120 km/h programmés. Oui, c’est toujours le confort qui prime ici.
A l’intérieur toujours, le Sport fait la part belle aux technologies: la navigation, le head-up-display et les affichages dans le tableau de bord sont autant d’éléments qui composent un univers entièrement numérique et tactile, où ne subsistent que cinq boutons: celui du démarrage, deux molettes rotatives qui commandent à la fois la clim et la température des sièges, le volume de la radio et le sélecteur de modes de conduite sur la console centrale. En contrepartie, les nombreux menus accessibles via l’écran sont assez complexes.
VERDICT – Hans-Peter Steiner, essayeur
Si le milieu urbain n’est très certainement pas l’environnement de prédilection des Range Rover, qui lui préfèrent la boue d’un champ de rase campagne, force est de constater que le Range Rover Sport passe plutôt inapercu en ville, d’autant plus lorsqu’il est revêtu, comme notre exemplaire d’essai, d’un noir intégral. Discret, le SUV majestueux évolue néanmoins dans la circulation avec une élégance rare. Bref, il est aussi souverain que ses frères de sang, le «normal», le Velar et l’Evoque. A son volant, le conducteur détient la puissance mais, en vrai «gentleman», il n’en use que lorsque cela s’avère réellement nécessaire. Et dans ce cas, le Sport Utility Vehicle a tout ce qu’il faut pour faire parler la poudre! Quant à l’assistance électrique, elle sublime l’auto tout en passant inaperçue. Très utile en milieu urbain, où freinages et accélérations sont légion, elle permet surtout d’abaisser l’addition à la pompe à essence. Une économie bienvenue par les temps qui courent.