Une touche d’humanité

CONDUITE AUTONOME Avec Human Drive, le gouvernement britannique a soutenu les efforts faits pour calquer la conduite autonome sur le comportement du conducteur humain.

But du projet Human Drive (conduite humaine): repenser les approches utilisées jusqu’ici dans l’élaboration des dispositifs de conduite autonome, afin de les rapprocher davantage du comportement humain. Un consortium de dix entreprises, piloté par Nissan et financé par le gouvernement britannique, a ainsi travaillé depuis 2017 autour de deux thèmes principaux: d’une part la façon dont la voiture autonome reconnaît et traite chaque situation de trafic, d’autre part son style de conduite. 

Sans marquage au sol
L’un des repères sur lesquels les prototypes autonomes basent aujourd’hui leur conduite, ce sont les lignes latérales du marquage au sol. Un élément qui fait le plus souvent défaut lorsqu’il s’agit d’accomplir un trajet dans la réalité, c’est-à-dire en empruntant d’étroites routes de campagne, en traversant des localités sans marquages au sol ni bordures de trottoir, en roulant sur de mauvais revêtements, en effectuant des virages serrés, en affrontant de nombreux giratoires… Des situations que l’homme maîtrise à l’instinct mais qui, pour les voitures autonomes, étaient jusqu’ici difficiles à gérer. A l’occasion de la clôture du projet, Bob Bateman, chef de projet et ingénieur de développement chez Nissan, s’est déclaré très satisfait: «Le cahier des charges exigeait un trajet autonome sur une longueur de vingt miles dans la campagne anglaise; or, nous avons réussi à parcourir 230 miles (370 km).» 

Trois Nissan Leaf identiques, munies d’ordinateurs additionnels, ont servi de véhicules-laboratoires, mais une seule a couvert le trajet de 230 miles entre le centre technique de Cranfield et l’usine de Sunderland. A bord, huit lidars (lasers), sept caméras et un radar ont scruté l’environnement et épié les moindres mouvements. Le GPS à différentiel extrêmement précis, lui, permettait de positionner la voiture sur la route avec une parfaite exactitude, tandis que des processeurs performants et des logarithmes spécifiques transformaient les informations en injonctions de conduite. 

Le trajet a été accompli à 99% en autonomie, mais les questions relatives au style de conduite n’était pas encore prêtes à être testées sur la voie publique. Bob Bateman estime, en outre, que pour la ville, la conduite autonome à laquelle on aspire avec Human Drive exigera encore une puissance de calcul supérieure et d’autres protocoles d’apprentissage avant de pouvoir maîtriser les situations hypercomplexes générées par le trafic urbain. Raison pour laquelle, sur le trajet de 230 miles, le pilote d’essais a régulièrement dû reprendre la main sitôt que la situation devenait trop complexe.  

Perception radicalement altérée
L’adaptation d’un style de conduite humain a incombé au groupe d’électronique Hitachi et à l’Université de Leeds. Alors qu’Hitachi travaillait sur la technologie de commande en fonction de la situation, Leeds s’est employé à analyser le ressenti des passagers à l’aide d’un simulateur de conduite. Il en est par exemple ressorti qu’à vitesse identique, on ressent différemment la distance entre sa voiture et les véhicules garés au bord de la route selon que le soleil brille ou que les conditions météorologiques sont moins favorables. Un point dont il va falloir tenir compte dans la technologie de commande du futur. Les simulations ont aussi révélé que la majorité des cobayes se sentaient plus à l’aise lorsqu’ils étaient passagers d’une voiture conduite par un être humain que lorsque l’ordinateur était aux commandes.

Leeds va poursuivre ses travaux après la clôture du premier projet. Prochain point au programme: le mal des transports. L’université va étudier la question du changement éventuel du sentiment de bien-être du conducteur selon que la voiture roule en autonomie ou qu’il tient encore le volant en mains. La question de l’aménagement de l’habitacle des véhicules du futur sera également sous la loupe. 

La technologie d’Hitachi de réaction en fonction de la situation est d’ores et déjà intégrée aux trois Nissan Leaf-laboratoires, avec l’utilisation de capteurs en partie différents de ceux auxquels on avait fait appel pour le trajet de 230 miles. Ici aussi, les cartes de navigation servent de repères pour le positionnement, mais Hitachi calcule son trajet en intégrant en permanence l’environnement réel. «Cela veut dire que si l’on fait le même trajet dix fois de suite, la voiture pourra suivre dix fois une trajectoire différente», explique Nick Blake, directeur Stratégie de l’innovation chez Hitachi Europe. Cette approche concentre la puissance de calcul, moment par moment, ce qui génère moins de données et exige donc moins de capacité en mémoire. Mais Hitachi appuie aussi son travail sur la multitude d’informations collectées par des pilotes d’essais, notamment en ce qui concerne le choix de la trajectoire, les angles de braquage et les modifications de la vitesse. 

Hitachi, également, va poursuivre ses travaux au-delà du projet Human Drive. Avant tout, il va s’agir d’amener l’approche en fonction de la situation à maturité pour les tests sur la route. Nissan, pour sa part, va continuer à développer les projets entamés, et ce pour une durée de trois années supplémentaires. 

Sans l’humain, cela ne marche pas encore: le trafic urbain sur le parcours-test de 370 km exigerait davantage de puissance de calcul.

Le projet Human Drive

Outre son pilotage par Nissan, Hitachi et l’Université de Leeds, le projet Human Drive a bénéficié de l’appui d’autres firmes: Catapult, l’autorité de circulation routière Highways England, Aimsun, les sociétés de cyber-security Atkins et SBD Automotive, l’Université de Cranfield et Horiba Mira. Le gouvernement britannique a alloué un budget de 13,5 millions de GB£. Plus de 20 000 km ont été parcourus, 4000 téraoctets de données collectés; 135 personnes ont collaboré au projet et 360 autres participé à l’analyse des comportements humains dans le simulateur de Leeds.

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