Fourgonnette de luxe

Le Renault Kangoo compte parmi les pionniers du genre. Le modèle de troisième génération s’émancipe-t-il de son côté utilitaire?

C’est le Citroën Berlingo qui inaugura le segment des ludospaces, en 1996. Dès l’année suivante, le Renault Kangoo en augmentera l’attractivité grâce à une porte latérale coulissante. Depuis près de 25 ans, la clientèle apprécie ce véhicule familial spacieux et confort. Avec cette nouvelle édition, Renault conserve ces fondamentaux. Le nouveau Kangoo ne se contente toutefois pas de réactualiser une formule qui a fait ses preuves. La version Edition One testée, avec son moteur 1,3 litre de 100 ch associé à une boîte manuelle, a repris certains éléments de ses prédécesseurs tout en apportant du nouveau.

De l’espace en format compact

On ne s’assoit pas dans le Kangoo, on y grimpe. De là-haut, on ressent même un certain plaisir à trôner au-dessus du trafic. Ce ludospace est un parallélépipède rectangle qui n’occupe qu’une empreinte au sol réduite. A l’intérieur, cette forme anguleuse procure beaucoup d’espace et de liberté de mouvement, notamment à l’avant. La banquette arrière est assez large pour accueillir deux sièges enfants et un rehausseur au milieu. Les points d’ancrage Isofix sont aisément accessibles. Il faut avoir la force d’un adulte pour fermer la porte coulissante comme il faut, mais ce n’est pas forcément un défaut. Cette porte se montre, en outre, idéale pour installer à bord les enfants, les courses et tout ce qui va avec. Et une fois les sièges arrière rabattus, il est facile de transporter un grand réfrigérateur ou – pour rester dans le groupe cible – une maisonnette pour enfants. L’espace reste incontestablement la grande force du Renault Kangoo.

Le moteur, en revanche, est du genre discret. A la fois sur le plan acoustique et du point de vue dynamique. Une boîte manuelle est tout de même proposée, pour ceux qui s’ennuieraient au volant. De façon étonnante, le Kangoo reste confortable même à vide, grâce à une suspension assez souple, pas trop fermement amortie. En l’espèce, le ludospace du losange n’a rien à envier à une voiture de tourisme.

L’exception française

Le Kangoo de troisième génération a plus de maturité, mais Renault n’a pas pu s’empêcher d’y ajouter quelques trouvailles. Le support pour le téléphone portable saute aux yeux, par exemple. Le smartphone y est ainsi à portée de main, ce qui permet d’utiliser ses fonctions supplémentaires en toute légalité. Cela dit, le système de ventilation a fort à faire avec le volume de l’habitacle et doit toujours être réajusté. Cependant, le choix des matériaux permet au Kangoo Edition One de remplir sa mission de véhicule familial. Même si une bande de chenapans a «sévi» dans l’habitacle, les traces peuvent être éliminées sans trop d’efforts. Le Kangoo de troisième génération laisse aussi les complications techniques au garage: on y trouve aussi bien un frein à main mécanique qu’une clé classique à insérer dans la serrure de contact. La démonstration que praticité et confort n’ont rien de contradictoire.

RÉSULTATS

Note de la rédaction 77/100

moteur-boîte

Le quatre-cylindres 1.3 l se montre fluide et étonnamment silencieux. Toutefois, il est tout aussi discret dans la façon de déployer sa puissance.

trains roulants

Prévu pour le transport de charge à l’origine, le Kangoo n’est pas pour autant dénué de confort. Même à vide, il se montre agréable sur route.

Habitacle

Son habitabilité est son clair point fort, il marque de gros points ici. 

Sécurité

Toutes les aides à la conduite du moment sont de la partie. Leur fonctionnement ne diffère en rien par rapport à une berline traditionnelle.

Budget

Beaucoup pour peu: le rapport prix-prestation est renforcé par l’équipement généreux. Difficile de croire d’être à bord d’une fourgonnette. 

Verdict 

Les grands voyageurs iront voir ailleurs, mais ceux qui sont à la recherche d’une voiture capable de transporter confortablement une famille, du matériel pour une petite entreprise ou pour les hobbies risquent bien de tomber amoureux du Kangoo.

Vous trouverez le fiche technique de ce modèle et les mesures effectuées par la RA dans la version imprimée et dans le e-paper.


Rendez-nous nos ludospaces, gardez vos SUV!

En octobre 1973, le monde est touché de plein fouet par le premier choc pétrolier; entre octobre 1973 et mars 1974, le prix du baril quadruple, passant de 2 dollars et demi à plus de 11 dollars. Pour l’automobile, c’est une période de remise en question. Pour les grands constructeurs comme pour les plus petits, à l’image de l’enseigne suisse Monteverdi. Son fondateur et propriétaire, Peter Monteverdi, se dit qu’un véhicule tout terrain a moins de chance d’être affecté par le choc, puisqu’il poursuit le plus souvent un but bien précis. Monteverdi se lance donc dans le développement, la production et la commercialisation du Safari, un tout-terrain de luxe assemblé sur le châssis de l’International Harvester Scout.

Aujourd’hui, les SUV, les Sport Utility Vehicle, sont omniprésents sur nos routes, s’accaparant environ 40% des ventes de voitures neuves. Et pourtant, bien souvent, ces engins n’ont d’utilitaire que le nom. Quant à leurs facultés à rouler là où il n’y a plus de route, elles sont souvent proche du zéro. Aussi, peut-on affirmer que, dans la majorité des cas, les SUV ne tiennent pas les promesses que leur look suggère. Et, à l’intérieur, ils n’offrent guère plus de place qu’une voiture de tourisme traditionnelle. Et je ne vous parle même pas des SUV coupés. 

En revanche, les ludospaces et les monospaces, eux, offrent de réels atouts. A la fin des années 1930, Citroën avait réalisé une vaste étude de marché. Interrogeant des commerciaux itinérants, la maréchaussée et certaines compagnies de nettoyage, le fleuron français s’interrogeait sur les usages de ses clients: combien de fois descendent-ils de voiture, combien de fois les portes sont-elles ouvertes et fermées? Que transportent-ils, de quelle manière? De cette étude est né le premier monospace moderne au monde, le TUB ou «Traction Utilitaire B». L’une des caractéristiques principales étrennée par ce véhicule révolutionnaire était, sans conteste, sa porte latérale coulissante. Perfectionné, son successeur, le Citroën H, présenté en 1947, fut la première camionnette équipée d’une porte latérale coulissante en série. 

A bien des égards, les ludospaces et les monospaces sont bien plus «utilitaires» que les SUV. En effet, au contraire des véhicules rehaussés, ils allient tout le temps une cylindrée modérée à de grands volumes intérieurs. Quant à la porte latérale coulissante, elle est une preuve tangible que les ludospaces et autres vans utilisent l’espace disponible de manière efficace. Lorsqu’il s’agit d’accueillir de grands chargements et de nombreux passagers, les véhicules type Renault Kangoo, Citroën Berlingo mais aussi VW Caddy ou Ford Tourneo Connect se révèlent les plus pertinents, et ce sans prétention aucune.

Certes, il est vrai que le prestige social d’un ludospace est proche du néant. Que ce soit dans le voisinage ou sur l’autoroute, ce genre de véhicules est difficile à assumer pour une certaine frange de la population. C’est bien dommage, car ces voitures sont sacrément intelligentes. Si l’ingéniosité devait un jour redevenir un critère d’achat, les monospaces, breaks et toutes autres formes de véhicules renonçant au gaspillage de place auraient toutes leurs chances de s’imposer face aux autres genres de carrosserie. Le confinement et le télétravail nous poussant à repenser notre manière de vivre, pourquoi ne pas également réexaminer notre parc automobile? A l’instar de nos existences auxquelles on souhaite redonner de l’authentique, du vrai, pourquoi ne pas oter de nos voitures toutes les babioles en plastique, les faux pots d’échappement, les systèmes d’infodivertissement trop complexes?

Quant au «Sport» promis par le S de SUV, il est généralement plus facile d’en pratiquer au volant d’un ludospace que d’un SUV. En effet, un VTT n’est-il pas plus facile à transporter à la verticale à l’arrière d’un Caddy que dans un SUV, dont le seuil de chargement est nettement plus haut. Surtout, aujourd’hui, la plupart de ces véhicules utilisent désormais des plateformes de voitures de tourisme. Ils sont donc très agréables à conduire. En outre, certains peuvent même se targuer d’une propulsion hybride, plus écologique.

Pourquoi faudrait-il donc continuer à rouler dans des SUV? Bien plus malins, les ludospaces permettent à leurs propriétaires d’économiser beaucoup d’espace, de ressources et, finalement, d’argent. Dans un univers automobile de plus en plus pointé du doigt, comme lors du premier choc pétrolier, les voitures gagneraient à redevenir plus intelligentes. Que l’on ne se méprenne pas sur mes intentions: je ne cherche pas à dire que tout le monde devrait dorénavant vanter les mérites d’une Renault Kangoo et de ses 15 secondes nécessaires pour réaliser le 0 à 100 km/h. Ce que je veux dire, c’est que j’aime les voitures honnêtes, autrement dit les voitures de sport véritablement sportives, les véhicules tout terrain capables de s’aventurer hors des sentiers battus et les pots d’échappement à double sortie qui rejettent véritablement les gaz d’échappement. Et si l’espace doit être le premier critère, alors, autant qu’il y en ait le plus possible, avec peu d’efforts, peu de consommation et un petit prix. Certes, il se peut qu’un conducteur de Renault Kangoo ou de VW Caddy ne puisse tout simplement pas s’offrir une voiture plus faste. Mais il s’agit aussi, peut-être, d’une personne particulièrement rusée, qui utilise ses ressources de manière intelligente.

Martin Sigrist

Rédacteur en chef Classics REVUE AUTOMOBILE

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