Changements épars, mais profonds

Que nous réserve la politique des transports en 2022? Entre autres thèmes, la révision de la loi sur la circulation routière et le «Mobility Pricing» vont faire bouillir la Coupole fédérale. Les travaux du second tube du Gothard avancent.

Les Verts et Vert’libéraux ont gagné la bataille, mais pas la guerre. En effet, après leur forte poussée aux élections fédérales de 2019 – où ils ont grappillé des sièges supplémentaires –, les deux camps écologistes n’ont pas réussi à bouleverser le pays avec des réformes ayant trait à l’écologie. La meilleure démonstration en est le cinglant rejet par la population de la révision de la loi sur le CO2, le 13 juin 2021. Preuve en est que, malgré une prise de conscience des enjeux climatiques, la Suisse conserve une sensibilité bourgeoise. 

Sur le plan de la politique des transports, l’année écoulée a été plutôt calme, aucune votation importante n’a été à signaler. Cette période paisible perdurera en 2022, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il ne se passera rien dans le domaine des transports cette année. L’an dernier, les activistes du climat ont voulu attirer l’attention sur l’importante responsabilité du trafic motorisé dans le réchauffement climatique. Nier l’implication du trafic routier dans la production de gaz à effet de serre serait incongru, mais il serait aussi exagéré de pénaliser ce secteur beaucoup plus fortement que les autres, en le désignant comme principal coupable.

Routes nationales: les travaux avancent

Du côté du tunnel du Gothard, tout se déroule comme prévu. Officiellement, le premier coup de pioche a été donné fin septembre 2021, mais le gros œuvre est déjà en cours depuis le printemps. Les travaux d’excavation commenceront l’été prochain et le percement en tant que tel est prévu pour 2026. Le tunnel devrait être mis en service à partir de 2029. Sur l’A9 en Valais, l’ouverture du tube nord du tunnel de Viège est annoncée pour ce printemps et l’ensemble du contournement sud vraisemblablement pour 2024.

Le réaménagement du tronçon autoroutier entre les échangeurs A1/A5 de Luterbach et A1/A2 de Härkingen, point névralgique pour le réseau routier national, a pris du retard. L’Office fédéral des routes (Ofrou) a soumis le projet à une offre publique en mai 2018. Un recours a été déposé auprès du Tribunal administratif fédéral contre les plans de décembre 2020. Les personnes en charge du dossier estiment que le début des travaux sera repoussé en 2024 au plus tôt. La durée totale des travaux est estimée à huit ans.

La galerie d’assainissement de Belchen sur l’A2 connaît également des retards. Ce tube supplémentaire doit permettre la remise en état des tunnels existants, mais l’intégration d’équipements d’exploitation et de sécurité prend plus de temps que prévu. L’ouverture au trafic du tunnel d’assainissement n’interviendra donc qu’à l’été 2022.

LCR: Plus de flexibilité

En décembre 2021, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la modification de la loi sur la circulation routière (LCR) à l’attention du Parlement. Y figure, parmi les nombreuses propositions, l’élargissement de la marge d’appréciation des juges en cas de délit de chauffard. Les tribunaux pourront désormais mieux évaluer les circonstances du délit et éviter des verdicts exagérément sévères. Par ailleurs, la modification de la LCR doit rendre possible la conduite autonome en Suisse et le Conseil fédéral peut rendre le port du casque obligatoire pour les jeunes de moins de 16 ans circulant à vélo. Le Parlement doit désormais se prononcer sur ce projet de révision, dont les nouvelles mesures devraient entrer en vigueur de manière échelonnée à partir de 2023. 

Voies cyclables: dénouement proche

L’arrêté fédéral sur les voies cyclables et les chemins et sentiers pédestres – c’est-à-dire le contre-projet direct à «l’initiative vélo» –, avait été accepté à une large majorité par le peuple et les cantons lors de la votation du 23 septembre 2018. Le Conseil national a approuvé le projet lors de la session de décembre dernier, qui oblige désormais les cantons à planifier de nouveaux tronçons et remplacer les chemins supprimés. Le droit de recours des associations, lui, n’ira pas plus loin; comme prévu, il n’avait aucune chance de passer la rampe au Conseil national. Il s’agit maintenant, pour le Conseil des Etats, de reprendre les retouches apportées par le Conseil national afin que la loi puisse être adoptée lors de la session de printemps.

Révision de la loi CO2: seconde tentative

Après le rejet de la loi sur le CO2 à la suite de la votation du 13 juin 2021, le Conseil fédéral prépare une nouvelle mouture du texte. Il a, en ce sens, ouvert, le 17 décembre 2021, la consultation sur la révision de la loi sur le CO2 pour la période 2025-2030. Cette loi vise à réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 et à atteindre ainsi l’objectif climatique fixé à cette date. Le Conseil fédéral maintient cet objectif, mais renonce aux leviers qui ont contribué au rejet, par la population, de la dernière révision. Parmi eux figuraient notamment l’augmentation du prix du carburant et l’introduction d’une taxe sur les billets d’avion. La procédure de consultation s’achèvera le 4 avril 2022.

Le Mobility Pricing prend forme

Lors de sa séance du 24 novembre 2021, le Conseil fédéral a reçu du Detec (Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication) une vue d’ensemble de la situation actuelle et des prochaines étapes. Le rapport fait état de dix projets pilotes de tarification de la mobilité (voir RA 49/2021), déposés dans autant de régions différentes. Une démonstration de l’intérêt, de la part des cantons et des villes, de tester de nouvelles solutions. Hélas, presque tous les projets péchaient par leur volonté de ne taxer que le trafic routier. Le Detec souhaite donner à ces projets une base plus large, afin qu’elle intègre tous les modes de transports. Parallèlement, des études de faisabilité des projets pilotes seront réalisées. Une fois ces travaux terminés, le Conseil fédéral décidera, sans doute encore cette année, de la direction à suivre. 

Nouveau modèle de financement cherché

L’entretien de l’infrastructure routière et la garantie du budget y étant dédié demeurent un thème central au niveau fédéral. Aujourd’hui, le financement du secteur routier repose majoritairement sur l’impôt et la surtaxe des huiles minérales mais, avec l’électrification croissante du parc automobile – la décarbonisation du trafic routier est poussée par les instances dirigeantes –, cette source de financement va peu à peu se tarir, voire peut-être disparaître.

Afin d’assurer à long terme le renouvellement du fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (Forta), qui finance tous les aspects de l’entretien et de la construction des routes nationales, il faut donc impérativement trouver un substitut à l’imposition des carburants fossiles. Mais il s’agit aussi, pour l’Ofrou et le Detec qui travaillent sur le sujet, de respecter une égalité de traitement entre les voitures à moteur à combustion et les véhicules électriques. Et cela, de manière totalement indépendante aux études portant sur le «Mobiliy Pricing». Selon l’Ofrou, le Conseil fédéral devrait se prononcer sur la situation actuelle au premier trimestre 2022.

Plus de zones 30 et de covoiturage 

Pour faciliter la généralisation de zones limitées à 30 km/h sur les routes d’agglomération, le Conseil fédéral propose d’adapter l’Ordonnance sur la signalisation routière (OSR) ainsi que l’ordonnance du Detec sur les zones 30. En règle générale, la vitesse est limitée à 50 km/h sur les routes à l’intérieur des localités; pour déroger à ce principe, par exemple pour aménager une zone à 30 km/h, une expertise est aujourd’hui nécessaire. Le Conseil fédéral propose donc de renoncer à ce préalable pour l’aménagement de voies limitées à 30 km/h en zones habitables. Par ailleurs, afin de réduire la surcharge de trafic et la pollution, le Conseil fédéral s’exprime en faveur du covoiturage, en concédant l’utilisation exclusive de certaines voies de circulation aux véhicules transportant plusieurs occupants. Il est dès lors nécessaire d’introduire dans l’OSR un symbole «covoiturage» représentant une voiture avec plusieurs personnes. On pourrait voir ce pictogramme apparaître pour signaler une exception aux interdictions de circuler pour les voitures. Le nouveau symbole doit également être apposé comme marquage au sol sur les voies de bus, afin de signifier aux covoitureurs l’autorisation d’emprunter ces couloirs. Le délai pour la consultation sur les modifications de l’ordonnance sur la signalisation routière et de l’ordonnance du Detec sur les zones 30 est fixé au 25 février 2022.

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