Volkswagen construit sans conteste de bons produits, mais les vend au prix fort. Toute la difficulté consiste à les positionner au sein d’un groupe immense, au milieu de marques diverses et variées. Et ce qui est vrai pour les véhicules à combustion le reste pour les modèles électriques. D’après les statistiques d’immatriculations de voitures neuves en Suisse, il ressort que les modèles estampillés Volkswagen ne sont pas toujours les préférés des Helvètes: les Škoda Enyaq et Audi Q4 devancent nettement les VW ID.4 et ID.5. La berline compacte ID.3, elle, s’incline face à la Cupra Born, qui a connu un bon lancement. On pourrait penser que c’est injuste, car c’est Volkswagen qui assume tout le travail de développement et que les autres en profitent; ce n’est toutefois pas si simple que ça. Car les marques satellites doivent adapter une base donnée à leurs propres besoins. Alors, certes, les différences entre la Born et l’ID.3 sont faibles, mais les Espagnols ont tout de même su insuffler un petit supplément d’âme à leur création. Cela ne se limite pas à l’aspect visuel: par rapport à sa sœur de Wolfsburg, la Born profite d’un surcroît de puissance, d’une assiette surbaissée et d’une direction plus directe. Des retouches qui la rendent un tantinet plus sportive.
En Suisse, Cupra propose deux niveaux de puissance et deux tailles de batterie pour la Born: la version de 150 kW (204 ch) compte sur une capacité de 58 kWh, alors que la déclinaison de 170 kW (231 ch) laisse le choix entre cette même batterie et un accumulateur de 77 kWh. Cette version plus musclée compte sur un e-Boost, qui apporte un surcroît de peps pendant 30 secondes, mais à certaines conditions: il faut que la batterie soit suffisamment chargée et qu’elle soit à bonne température.
Le présent essai porte sur la version forte de 204 ch, vendue à partir de 39 950 francs et dont l’autonomie atteint selon le constructeur 424 kilomètres. La variante avec e-boost s’affiche à 42 000 francs, auxquels il faut encore ajouter 3500 francs pour repartir avec la batterie de forte capacité. En ce qui concerne les options, le groupe Volkswagen a renoncé aux listes à rallonge pour ses gammes électriques, leur préférant la simplicité des packs d’équipements. Bien dotée en la matière – notamment avec l’Advanced Pack qui regroupe pléthore de systèmes d’assistance – la voiture d’essai coûte 47 000 francs tout compris.
Entre apparat et utilité
En matière de dimensions et de proportions, l’ibère ne diffère guère de l’allemande: du fait de porte-à-faux légèrement plus courts, elle mesure trois millimètres de moins en longueur. Pas de quoi bouleverser la silhouette, ni les lignes générales, qui demeurent assez similaires. Orientation sportive oblige, la Cupra Born arbore un faciès plus agressif, ainsi que de nombreux éléments couleur cuivre, signature de la marque. Ces touches chaudes contrastent agréablement avec la robe bleu foncé «Aurora Blue». Le logo, enchâssé entre le capot et le bouclier, saute aux yeux, tandis que les lames latérales devant les roues arrière, le diffuseur arrière et l’énorme spoiler arrière donnent le ton, quand bien même ces artifices n’ont pas de rôle fonctionnel. Les aménagements apportés au châssis ne sont pas que de la poudre aux yeux; ils visent à rendre la plateforme modulaire électrique MEB plus affûtée. On retient la présence de ressorts plus rigides, qui abaissent la voiture de 15 millimètres à l’avant et de 10 millimètres à l’arrière, ainsi qu’une direction plus directe, qui se raffermit en mode Cupra. Ce dernier est activé via un bouton logé sur le volant. Un autre commutateur fait défiler les modes de conduite l’un après l’autre.
Dans les faits, ces ajustements pour dévergonder la Born par rapport à l’ID.3 ne font pas une grande différence. Les deux voitures sont au coude-à-coude sur le 0 à 100 km/h (7,3 secondes) quand bien même la Born parvient, selon nos mesures, à battre la valeur déclarée de deux dixièmes. Moteur électrique oblige, le démarrage est instantané et l’on distance facilement des voitures thermiques plus puissantes quand le feu passe au vert. Les relances sont tout aussi vigoureuses, comme on peut s’en apercevoir en réaccélérant en sortie de localité (50-80 km/h en 2.4 s) ou pour s’engager sur l’autoroute (80-120 km/h en 5,0 s). Le poids à vide de 1,8 tonne est masqué par l’énorme couple, lors des phases d’accélération, mais il se rappelle à notre bon souvenir dans les virages. Voilà qui vient ternir l’aura sportive que cherche à se donner Cupra. Heureusement, le centre de gravité très bas permet de limiter la casse, les mouvements de caisse étant limités. Reste que sa propension au sous-virage a vite fait de se manifester et les aides électroniques, très nombreuses, n’y pourront pas grand-chose. Rien à redire toutefois sur le plan de la sécurité; l’ESP et le contrôle de traction veillent au grain. Il n’est d’ailleurs pas possible de désactiver complètement l’ESP, qui devient seulement un peu plus permissif en mode sport. Pour une propulsion à moteur arrière – autrefois synonyme d’agilité et de plaisir de conduite – la Born a plutôt choisi la voie de la sagesse. Une sportive docile, qui distille des sensations au compte-goutte.
Au décompte des kWh, on s’aperçoit que la consommation dépasse légèrement les standards de la catégorie. Nous avons relevé 20 kWh/100 km au terme de nos 2400 kilomètres d’essai, avec un minimum de 17,7 kW/h sur notre boucle normalisée de 120 kilomètres. Cette valeur est à comparer à la moyenne du segment, de 16,9 kWh/100 km, observée sur le même parcours. Au vu de la capacité utile de la batterie de 58 kWh, l’autonomie maximale retombe donc à 320 kilomètres. Il est ensuite possible de recharger la Born sur une borne rapide de courant continu (jusqu’à 120 kW), qui permet – en théorie, du moins – de recouvrer 80% de la charge en une petite demi-heure. En pratique, la furtive hispanique souffre néanmoins d’un phénomène commun à toute la progéniture MEB: la puissance de charge augmente rapidement en début de cycle, puis décline ensuite de manière tout aussi marquée. Une fois passé le seuil des 35% de récupération, la puissance de recharge baisse ainsi progressivement jusqu’à se stabiliser à environ 50 kW. Le fait que la batterie ne soit pas préconditionnée en vue du processus de charge explique sans doute ce phénomène.
Recyclé et attractif
L’agencement de l’habitacle est un autre point commun avec les modèles du groupe. On retrouve au-dessus du volant le petit panel d’instrumentation numérique et le sélecteur de marche, attaché sur le côté. Le grand écran central et l’affichage tête haute sont aussi de «vieilles» connaissances. Quant aux textures et matériaux de finition, ils se veulent avant tout écologiques: le revêtement des sièges, nommé Sequal Yarn, ressemble à de l’Alcantara mais se compose de polyester composé de bouteilles en PET recyclées et de déchets plastiques repêchés en mer, au large des plages de Barcelone, ville natale de Cupra. Le but est d’éviter autant que possible les matériaux composites, difficiles à recycler. En fin de compte, la Born apporte la preuve que des matières réutilisées et réutilisables ne sont pas forcément moches. Le style intérieur se montre même attractif, parsemé ici et là d’inserts cuivrés et de motifs triangulaires propres à la marque, que l’on retrouve perforés sur les sièges ou en relief sur le tableau de bord.
A commandes identiques, défauts identiques
Dans les modèles MEB, tout s’opère via l’écran tactile et la voix. Malheureusement, l’imbrication des menus et la commande vocale perfectible sont irritants et sont sources d’inattention. On s’étonne aussi de retrouver ces commandes de température et de volume sans rétroéclairage, alors que la critique remonte à la sortie de l’ID.3. Nous retrouvons aussi ces surfaces tactiles sur le volant et la platine de réglage des rétroviseurs, dont la trop grande sensibilité est source de fausses manipulations. La main se pose si souvent sur l’accoudoir qu’on a tôt fait d’effleurer involontairement ces commandes. Dans le même registre, personne n’a vraiment compris l’avantage de n’avoir que deux boutons de lève-vitres, qui servent pour l’avant et l’arrière selon la position d’un troisième commutateur. Sans doute un excès de zèle du contrôleur des coûts!
Passons ces détails pour souligner un atout majeur du binôme Born/ID.3: l’espace disponible à bord, optimisé grâce au plancher plat, au long empattement et à une carrosserie qui s’assimile presque à celle d’un monospace. Un fois installé sur les larges sièges avant, le sentiment d’aisance est manifeste. Et cette impression d’espace vaut tout autant aux places arrière, taillées pour des adultes de bonne corpulence. Il y a de la réserve au niveau de la garde au toit et l’absence de tunnel central dégage de précieux centimètres pour les jambes.
La Cupra Born est-elle donc la variante sportive que Volkswagen ne concède pas à son ID.3? La réponse est plus nuancée que cela: l’espagnole est un peu plus dynamique, plus insolente et plus jeune que sa sœur de Wolfsburg. Toutefois, les deux produits ne ciblent pas la même clientèle. Les amateurs d’e-boost et de décors cuivrés ont fait leur choix.
Résultats
Note de la rédaction 70.5/100
moteur-boîte
Malgré ses 204 ch, la Cupra Born se démontre très fringante à l’accélération. La consommation, relevée à 19,5 kWh/100 km, est au-dessus de la moyenne; l’autonomie en souffre logiquement.
trains roulants
Le châssis bénéficie de réglages un peu plus fermes et la direction plus tranchante confèrent à la Born une saveur légèrement sportive.
Habitacle
Cupra va jusqu’au bout de sa démarche «éco-responsable» et propose un habitacle garni de matériaux recyclés. La garde au toit est généreuse, l’espace abondant, même pour les passagers arrière.
Sécurité
L’éternelle pierre d’achoppement: les commandes tactiles, omniprésentes, sont sources de distraction. A cela s’ajoute que le système d’infodivertissement est peu intuitif. Les freins se montrent puissants.
Budget
Le prix de base d’un peu moins de 40 000 francs est correct, tout comme la politique des options. Les deux ans de garantie d’usine (8 sur la batterie) sont un peu faibles, en comparaison avec l’offre des coréens.
Verdict
La Cupra Born n’est-elle qu’une copie de l’ID.3, ou la version sportive dont est privée la VW ID.3? Ni l’une ni l’autre! Malgré sa ressemblance, le Born mérite d’être traité comme un modèle à part entière. Elle séduit avec son comportement un brin sportif et son caractère impertinent. Elle souffre toutefois des mêmes problèmes que ses sœurs, dans le groupe.
Vous trouverez le fiche technique de ce modèle et les mesures effectuées par la RA dans la version imprimée et dans le e-paper.