Long capot étroit, ailes détachées, silhouette basse et arrière ultra-court: le style classique de la Morgan fait l’effet d’un aimant pour les regards. Certains pourraient même croire qu’il s’agit d’une oldtimer bien conservée, à la vue du style de la Plus Four. La dernière-née de la famille Morgan affiche une flagrante ressemblance avec la 4-4, la première voiture à quatre roues de la maison britannique, qui remonte à 1936.
Plateforme en aluminium
Cet aspect désuet est néanmoins trompeur: cette carrosserie classique cache une technologie tout à fait moderne. Le constructeur britannique délaisse en effet le châssis porteur en acier, qui a servi de base à ses produits pendant 85 ans, pour une architecture en aluminium collé. Cette nouvelle plateforme, dénommée CX, fait appel à des suspensions indépendantes aux quatre roues (double bras transversaux), en lieu et place des combinés ressorts-amortisseurs avant de type sliding pillar et de l’essieu arrière rigide à ressorts à lames. Les ingénieurs de Westmidlands font d’ailleurs un immense saut dans la modernité puisqu’à partir de début 2023, toutes les Plus Four et Plus Six sortiront des ateliers de Malvern avec des airbags et un contrôle de trajectoire (ESP). Les coussins de sécurité impliquent une refonte du tableau de bord, mais celui-ci reste fidèle au design général de la voiture, toujours vintage.
La Plus Four se présente ainsi comme une sportive affûtée, mais toujours spartiate. Au menu: capote en toile à commande manuelle, fenêtres amovibles et volume utile restreint. Il faut aussi faire preuve de souplesse pour monter et sortir du roadster, en raison des épais longerons. Et c’est encore pire avec le toit en place! Derrière les sièges, il y a un peu de place pour les sacs, mais les valises devront voyager sur le porte-bagages.
Un caractère bien trempé
La Plus Four est une voiture sensationnelle au premier littéral du terme, mais elle se montre finalement assez docile. A l’image d’une sportive moderne, sa mécanique fonctionne rondement. Et puis elle tient bien le pavé, tout en absorbant convenablement les défauts de la route. Toutefois, les possibilités de personnalisations sont si étendues que le caractère et la conduite peuvent fortement différer d’un exemplaire à l’autre.
Pour les séries Plus, Morgan achète ses moteurs et boîtes de vitesses chez BMW. Le 2-litres biturbo de la Plus Four est le premier quatre-cylindres suralimenté monté dans une Morgan. Ce moteur à injection directe développe 190 kW (258 ch) et peut être couplé, au choix, à une boîte manuelle à six vitesses ou à une unité automatique à huit rapports, comme sur «notre» monture d’essai. Très civilisée sur le plan acoustique, cette mécanique séduit par son harmonie, comme nous l’avons déjà constaté sur les produits bavarois. Les amateurs de confort apprécieront les changements de vitesse à peine perceptibles. Mais quand on la cravache, la voiture réagit au quart de tour; on se régale alors des changements de vitesse par impulsion sur les palettes, ultra-rapides et bien verrouillés. Cette efficacité est difficile à égaler, même pour les champions des changements de vitesse éclair avec levier manuel. La Morgan Plus Four peut ainsi changer sa personnalité, entre jouer à la flâneuse confortable ou se muer en une sportive déchaînée.
La performance doit aussi beaucoup au châssis. La plateforme CX, bien plus rigide que l’antique châssis en acier, constitue un solide prérequis aux plaisirs de la conduite. Sans dénaturer ce sentiment d’authenticité qu’on ressent au volant d’une Morgan. Bien équilibré et doté d’une direction précise, le roadster anglais affiche un comportement agile et réactif dans les virages. Certes, c’est bien là ce qu’on demande à toute biplace sportive, mais mener une Morgan sur les routes sinueuses des Préalpes reste une expérience unique, (presque) sans filtres, excitant tous les sens.
Faite main et durable
Les produits Morgan font encore appel, dans une large mesure, au savoir-faire manuel. Le bois tient ici un rôle important, même s’il n’est plus utilisé pour les éléments porteurs. Le cuir est lui aussi indissociable d’une Morgan, mais son utilisation doit être progressivement réduite. Les peaux sont des sous-produits d’élevages bovins régionaux (Angleterre, Irlande) qui respectent les cinq principes imposés par le comité britannique pour le bien-être des animaux. Sur les 700 à 800 véhicules produits annuellement par Morgan, une trentaine prend le chemin de la Suisse. Les Morgan sont officiellement distribuées par Kestenholz Automobile à Pratteln et par Autobritt à Genève.