Un premier jet

Toyota se lance dans le grand bain de l’électrification avec le bZ4X, un SUV spacieux et dynamique. Ses qualités sont-elles suffisantes pour bousculer une concurrence déjà bien établie?

Toyota figure incontestablement parmi les marques les plus innovantes. Grâce à la Prius lancée en 1997 et à la Mirai en 2014, la firme nippone peut se targuer d’avoir commercialisé les premiers véhicules hybrides et hydrogènes du marché. En revanche, Toyota a toujours rechigné à s’engager sur la voie du tout électrique, en raison d’une fort scepticisme de la direction à l’égard de cette technologie. Du moins était-ce le cas auparavant. Car depuis peu, le vent a tourné en Europe, les autorités ayant acté la fin des véhicules rejetant du CO2 à partir de 2035. Face à cette sentence, le plus grand constructeur de la planète n’a guère le choix; il doit lui aussi se lancer dans la course aux électrons s’il souhaite conserver son statut de numéro un. Quoi de mieux pour se jeter dans le grand bain de l’électrification qu’un modèle assuré de plaire, autrement dit un SUV? La messe était dite. 

Enfin, il restait encore à déterminer son nom. Si Toyota a construit son catalogue sur de fortes dénominations (Supra, Land Cruiser, Corolla…), il a malheureusement choisi un nom alambiqué pour désigner son nouveau véhicule électrique. Plus proche d’un mot de passe WiFi que d’un véritable nom de voiture, bZ4X est en fait l’acronyme de «beyond zero» (soit au-delà de zéro en anglais), de «4» qui fait référence à son positionnement dans la gamme et de X qui se rapporte à son côté baroudeur rehaussé. Cette désignation confuse – il faut en tout cas un certain laps de temps pour la mémoriser – est d’autant plus dommage que toute la gamme électrique de l’entreprise nippone suivra la même logique d’appellation. Quoi qu’il en soit, aussi important que soit un nom, il ne détermine en rien les qualité techniques et mécaniques d’une voiture.

Plateforme dédiée e-TNGA

Le bZ4X est un vrai véhicule électrique. Autrement dit, il repose sur un châssis dédié. En l’occurrence, il s’agit de la plateforme technique modulaire e-TNGA développée en commun avec Subaru, qui l’utilise également sur son SUV Solterra, le frère jumeau du bZ4X. La configuration de ce châssis est typique de celle des plateformes électriques, avec une batterie située sous le plancher, entre les deux essieux. Le bZ4X, qui repose sur des jambes de force MacPherson à l’avant et une suspension multibras à l’arrière, est disponible en version traction ou quatre roues motrices. La variante deux roues motrices est équipée d’une seule machine électrique dont la puissance est de 150 kW (204 ch) et le couple de 266 Nm. Le modèle essayé dans ces lignes reçoit deux machines électriques de 80 kW (109 ch), disposées sur chacun des essieux. Elles fournissent d’une puissance et d’un couple cumulés de respectivement 160 kW (218 ch) et 337 Nm.

Le bZ4X est équipé d’une batterie de 71,4 kWh (capacité brute), et ce indépendamment de la motorisation. Sur le papier, celle-ci autorise une autonomie théorique comprise entre 411 et 436 km (dans le cycle WLTP), selon la finition et la transmission retenue. 

Dans les faits, le 4×4 Toyota a révélé un rayon d’action bien inférieur aux valeurs revendiquées par le constructeur. Et pour cause, nous n’avons jamais réussi à reproduire la consommation de 18,1 kWh/100 km avancée par Toyota durant le test. Dans les faits, l’auto peut consommer jusqu’à plus de 30 kWh/100 km sur autoroute.

250 km, pas davantage

Cette tare s’avère contraignante lors des longs trajets, où le bZ4X force son propriétaire à s’arrêter tous les 250 km, voire moins puisque la courbe de puissance lors de la recharge à la borne s’effondre après 80 % et que la capacité de la batterie (71.4 kWh) est une valeur brute (Toyota ne communique pas la nette). Une telle multiplication des arrêts de recharge est un véritable frein à la polyvalence, une qualité pourtant cruciale sur un modèle pareil. Cette autonomie limitée est d’autant plus rédhibitoire que le système de navigation du bZ4X ne propose pas de planificateur de voyage indiquant la localisation des bornes et le temps d’arrêt nécessaire. Il en existe pourtant chez la concurrence, notamment chez Tesla et Volkswagen. En outre, l’auto est plutôt faiblarde du côté de la puissance de recharge: limité par la tension relativement modeste (355 V) de son architecture électrique, le SUV profite en théorie d’une puissance en courant continu de 150 kW en crête. C’est bien moins que les 239 kW revendiqués par les références de la catégorie que sont les Kia EV6 et autres Hyundai Ioniq 5. 

Pire, lors du test, les essayeurs qui se sont relayés au volant du SUV nippon n’ont jamais réussi à charger l’auto à une telle puissance. Au mieux, c’est une valeur avoisinant les 50 kW qui a été constatée aux différentes stations de recharge rapide utilisées lors de l’essai (en hiver, les temps de recharge sont plus lents). Et le temps passé aux bornes de se rallonger en conséquence. A domicile, la recharge prend aussi du temps puisqu’elle limitée à 6,6 kW de puissance. Il faut également préciser que Toyota propose un toit solaire. Facturée 3400 francs, l’option fournit de l’électricité aux systèmes auxiliaires de la voiture lorsqu’elle roule et à la batterie lorsqu’elle est garée. De quoi créer une énergie suffisante pour parcourir 11,7 km par jour, selon Toyota.

Inspiration Peugeot

A l’intérieur, le bZ4X s’inspire de l’habitacle des dernières Peugeot, le combiné d’instrumentation étant situé au-dessus de la jante du volant. Toyota semble en revanche avoir mieux travaillé l’agencement, puisque au contraire des productions françaises, aucun problème de lisibilité du combiné d’instrumentation n’est à déplorer ici. Le volant est aussi mieux positionné dans la mesure où il ne donne pas l’impression d’être sur les genoux du conducteur. A l’inverse, l’ambiance est nettement plus austère que dans les productions du lion. 

En outre, les habillages en plastique ne sont pas de première qualité. Bien au contraire, certains matériaux semblent avoir été choisis davantage pour leur prix que pour leur qualité, ce qui est difficile à accepter pour une voiture de 61 200 francs. Cela dit, dans l’ensemble, la qualité d’assemblage est relativement correcte. En outre, l’ergonomie est bien pensée avec des commandes qui tombent parfaitement sous la main. Il est heureux de constater que Toyota continue de faire appel à des boutons physiques pour certaines fonctions. Quant à l’écran central dédié aux multimédias (de 8 ou 12,3 pouces selon la finition retenue), il incorpore d’importantes optimisations, grâce notamment à un nouveau système d’exploitation, plus fluide, intuitif et moderne. Il se dote en plus d’un nouveau système de cartographie et d’un dispositif de commande vocale intelligent.

Pour le reste, les passagers avant sont intelligemment cloisonnés via une large console centrale qui tranche avec les volumes ouverts et peu pratiques auxquels les constructeurs ont de plus en plus recours. Pour les rangements, le bZ4X pose un constat nuancé. D’un côté, il profite de nombreux espaces disséminés un peu partout dans son habitacle parmi lesquels un compartiment pour smartphone particulièrement pratique puisque doté d’un couvercle transparent afin de permettre au conducteur de voir rapidement s’il a reçu une alerte ou non. De l’autre, il fait abstraction de boîte à gants, un accessoire vieux comme le monde dont l’utilité a pourtant été mille fois prouvée. Dans leur volonté de réinventer la voiture, les constructeurs passent parfois à côté de choses essentielles…

Habitabilité accueillante

Cela dit, l’absence de compartiment face au passager avant permet un avantage de taille, littéralement: dégager un bel espace au niveau des jambes. L’architecture du véhicule consentant de rejeter les roues aux quatre coins du véhicule, l’empattement généreux (2,85 m) accueille confortablement les passagers arrière (jusqu’à 48 cm au niveau des genoux), du moins sur les places latérales puisque l’assise centrale présente une assise et un dossier légèrement courbé. Le coffre, lui, se caractérise par sa contenance de 452 litres. Une valeur plutôt basse pour le segment. Heureusement, un plancher modulable sur deux niveaux dissimule un espace pouvant ajouter 71 mm supplémentaires à la hauteur de chargement. C’est bien vu puisque cela permet par exemple de ranger les deux câbles de rechargement. Autre bon point, le seuil de chargement est positionné relativement bas (73 cm), ce qui est toujours pratique pour charger et décharger des objets lourds.

Sur la route, le bZ4X 4×4 s’avère plus dynamique qu’escompté. L’auto, qui profite d’un poids à vide raisonnable (2040 kg selon nos propres mesures) eu égard de la taille et de la motorisation, jouit d’une excellente stabilité. Les mouvements de roulis sont maîtrisés, notamment grâce au centre de gravité bien positionné. Les suspensions sont plutôt fermes et le SUV réagit plutôt sèchement aux bosses et autres imperfections du bitume.

Les routes semi-carrossables plaisent également à ce SUV, qui jouit d’une belle garde au sol de 21 cm. Sur les routes mouillées, voire verglacées en hiver, le bZ4X profite d’une excellente motricité; la puissance méticuleusement dosée est répartie avec beaucoup de pertinence sur chacun des deux essieux. Du côté des aides à la conduite, tout y est, avec notamment un système qui empêche l’ouverture des portières lorsqu’un cycliste ou un autre véhicule est détecté. L’auto propose en outre des mises à jour à distance du logiciel. Autant de technologies qui donnent une bonne indication sur la voie que Toyota compte suivre dans les dix prochaines années. 

Résultats

Note de la rédaction 69.5/100

moteur-boîte

La double chaîne cinématique composée de deux machines électriques et de deux boîtes à une seule vitesse fonctionne bien. La motricité qu’elle prodigue est excellente.

trains roulants

Avec ses suspensions McPherson à l’avant et ses essieux multibras à l’arrière, le 4×4 est correctement suspendu. Il est plus dynamique que confortable.

Habitacle

Compartimenté à l’avant, l’habitacle offre un bel espace aux passagers arrière mais un volume plutôt limité dans le coffre. 

Sécurité

Les aides à la conduite sont pléthoriques et fonctionnent de façon adéquate dans l’ensemble.

Budget

Les prix pratiqués par Toyota sont comparables à ceux en vogue chez les concurrents. Pas d’exagération du côté de la liste d’options. 

Verdict 

Le Toyota bZ4X n’offre pas le niveau technologique qu’on attend d’un constructeur qui s’était jadis montré capable de créer une technologie hybride ultra-complexe. Plus généralement, il semble que Toyota, qui nous avait pourtant habitués à se dépasser sur ses dernières nouveautés, n’ait pas mis autant de cœur à l’ouvrage sur ce produit-ci. L’auto profite néanmoins de certains atouts, à commencer par son poids contenu, eu égard de la technologie et de son dynamisme.

Vous trouverez le fiche technique de ce modèle et les mesures effectuées par la RA dans la version imprimée et dans le e-paper.

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