Une infraction hors de contrôle

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la «perte de maîtrise» ne signifie pas forcément une grosse embardée. Il s’agit en réalité d’une infraction «fourre-tout», retenue au moindre problème sur la route.

Plus qu’une interdiction de perdre le contrôle de leur véhicule, les conducteurs doivent en tout temps garder une parfaite maîtrise de leur auto. Cette différence paraît subtile, elle est en réalité cruciale: en instaurant une obligation générale de maîtrise, la loi n’englobe plus uniquement les accidents, mais tous les petits soucis qui peuvent survenir. 

Par exemple, cette obligation inclut la maîtrise de toutes les commandes du véhicule, de conduire une voiture en parfait état de marche, d’être en tout temps attentif, d’anticiper les éventuelles situations dangereuses et d’être capable d’apprécier les conditions de circulation dans leur ensemble. A cela s’ajoute la perte de maîtrise telle qu’on l’imagine dans le sens commun, à savoir le fait de quitter la route, heurter un mur, finir dans un champ, se renverser dans un fossé et ainsi de suite. Tous ces aspects font partie de l’obligation légale prévue à l’art. 31 de la LCR. 

Des cas inattendus pris en compte

Hélas, tombent aussi sous cette définition des cas inattendus. Le Tribunal fédéral a par exemple jugé que l’utilisation tardive du klaxon en cas de danger constituait déjà une faute de circulation (ATF 104 IV 28). Il en va de même en cas de manque de visibilité en raison de vitres embuées, sales ou recouvertes de neige (JdT 1946 I 462). 

La Haute Cour avait également considéré que de mésestimer la vitesse d’un véhicule venant en sens inverse, par exemple avant de bifurquer, tombait également dans la catégorie «manque de maîtrise». Ce cas se présente typiquement quand un vélo électrique arrive en sens inverse: puisqu’il est difficile de le reconnaître à distance, il faudra être particulièrement attentif à la vitesse à laquelle il évolue pour éviter l’accident lors d’une manœuvre. 

Pas besoin d’avoir un accident pour se voir reprocher une «perte de maîtrise»: un dérapage, même contrôlé, est déjà répréhensible.

Une infraction très facilement retenue

Les autorités judiciaires font même preuve de sévérité envers les automobilistes qui tentent d’éviter une situation dangereuse. C’est l’amère expérience qu’a faite un automobiliste qui, pour éviter un choc frontal, a dérapé et fini dans un talus. Pourtant, ce conducteur malheureux circulait tout à fait normalement et à une vitesse adaptée sur sa voie de circulation avant les faits. Voyant soudainement arriver en sens inverse un véhicule qui débordait sur sa piste, il s’est décalé sur sa droite, mordant ainsi le bord du trottoir. 

Surpris, il a alors donné un coup de volant sur la gauche et a dérapé. S’il a ainsi évité un accident, il a néanmoins fini dans un talus. Les autorités judiciaires ont considéré que sa deuxième réaction, soit le coup de volant à gauche, était excessive. Le Tribunal fédéral a vu dans ce geste «en trop» une violation de son obligation de maîtrise du véhicule. La Haute Cour retiendra certes la faute très légère, mais condamnera tout de même le conducteur (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1006/2016). La vitesse inadaptée est également considérée comme un manque de maîtrise du véhicule, bien qu’elle fasse l’objet d’une réglementation spécifique (art. 32 de la LCR). Ici aussi, nul besoin d’un accident pour se voir reprocher une «perte de maîtrise». Une vitesse inadaptée constitue elle-même un manque de maîtrise du véhicule, puisqu’elle entraîne nécessairement une situation dangereuse ou une gêne à la circulation et à la fluidité du trafic.  Ainsi, le fait de démarrer en trombe, en faisant crisser ses pneus, est en réalité constitutif d’un dérapage susceptible d’engendrer un accident. Il s’agit donc d’un comportement dangereux et d’un défaut de maîtrise du véhicule, même si le dérapage était intentionnel. Inversement, circuler à une allure trop lente est également une infraction, puisque cela engendre une gêne pour les autres conducteurs. Vous l’aurez  compris: au volant, vous avez l’obligation d’être alerte, raisonnable et prêt à réagir à chaque instant pour ne pas tomber dans la faute, si vite arrivée.

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Dépassement par la droite: plus de clémence, mais…

Lors de la précédente chronique, nous avions vu que le Tribunal fédéral avait légèrement assoupli sa jurisprudence en matière de dépassement interdit par la droite. Il avait qualifié une telle infraction de violation légère des règles de la circulation routière et infligé une simple amende d’ordre.

Depuis lors, le Tribunal fédéral a rendu un second arrêt, par lequel il rappelle qu’une condamnation pour violation grave des règles de la circulation routière peut toujours être prononcée si le dépassement s’avère dangereux. Dans le cas d’espèce, le conducteur avait dépassé quatre véhicules par la droite, à proximité d’une sortie d’autoroute, alors que la circulation n’était pas suffisamment dense pour que les véhicules circulent en file parallèle. 

Le Tribunal fédéral a ainsi tout d’abord rappelé que le devancement par la droite n’était autorisé qu’en cas de circulation dense. Ainsi, dans le cas de notre automobiliste, il s’agissait bien d’un dépassement interdit par la droite. La Haute Cour a ensuite considéré que celui-ci constituait une faute grave, vu le nombre de véhicules dépassés et la proximité de la sortie d’autoroute (arrêt du Tribunal fédéral 6B_231/2022). 

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