De prime abord, les termes SUV et écologie sont plutôt antinomiques. Et pour cause, la surface frontale plus importante et le supplément de poids (par rapport à une berline de même accabit) va forcément à l’encontre de la consommation. A priori, l’Ocean, qui mesure 4,8 mètres de long, 2 mètres de large et 1,63 mètre de haut et pèse 2,5 tonnes ne fait pas exception à cette règle. Et pourtant, son constructeur, Fisker, n’hésite pas à utiliser le terme «écomobile» pour le décrire. Est-ce justifié?
Le constructeur américain explique que plus de 50 kg de matériaux utilisés pour fabriquer l’Ocean sont recyclés ou du moins biosourcés, c’est-à-dire qu’ils sont issus de matière organique renouvelable (biomasse). Une grande partie de ces matériaux est utilisée dans l’habitacle. Les tapis, par exemple, sont fabriqués à partir de bouteilles en plastique recyclées. Si elles sont généralement esthétiques, certaines incrustations ne parviennent pas à dissimuler leur origine. Les boutons en plastique du volant, par exemple, semblent plutôt «graisseux» et grincent lorsqu’on les utilise, et les boutons de lève-vitres ou de climatisation sont loin d’être de bonne qualité. Un peu plus de soin n’aurait pas fait de mal. Pour se prétendre écologique, le SUV a été contraint de faire quelques compromis, y compris en ce qui concerne le revêtement des sièges. Il n’y a pas de cuir, mais, selon la version choisie, on aura du tissu (Fisker l’appelle EcoFabric), du similicuir ou du faux Alcantara. Le daim synthétique semble être le meilleur choix, car les sièges, particulièrement les fauteuils arrière, n’offrent pas un bon maintien latéral. Ils ont donc besoin d’un revêtement antidérapant.
Les sièges sont en tout cas confortables, à l’avant comme à l’arrière. Et l’espace ne manque pas. En revanche, à l’arrière, le coffre n’est pas énorme, avec un volume d’à peine 500 litres, mais on y accède facilement, notamment grâce à la vitre du hayon, qui peut s’abaisser électriquement. L’habitacle présente une finition correcte et une mention spéciale doit être faite à l’écran de 17’’ pivotant (disposé en mode portrait lorsque le véhicule roule et en mode paysage quand il est à l’arrêt).
Autonomie remarquable
Conçu en Californie et fabriqué en Autriche chez Magna Steyr, une usine aux références pour le moins sérieuses, l’Ocean est assemblé sur une plateforme modulaire codéveloppée par Magna et Fisker. Deux types de batteries, assemblées par l’équipementier chinois CATL, sont disponibles: la version «Touring Range Sport» reçoit une batterie LFP (lithium-fer-phosphate) de 75 kWh. D’une autonomie de 440 km, elle n’est dotée que d’une seule machine électrique. Disposée sur l’essieu avant, elle développe 205 kW (275 ch). Les versions «Hyper Range Ultra» et «Hyper Range Extreme» sont quant à elles équipées de deux machines (et donc de quatre roues motrices). D’une puissance respective de 400 kW (540 ch) et 415 kW (564 ch), elles disposent toutes deux d’une énorme batterie NMC (nickel-manganèse-cobalt) de 113 kWh brute ou 106 kWh en valeur nette. De quoi couvrir 610 km et 707 km en une seule charge. Impressionnant, n’est-ce pas? Il en va de même pour la charge remorquable: 1820 kg. C’est beaucoup pour un SUV électrique. Fisker ne communique pas encore les valeurs de consommation officielle de l’engin mais si l’on s’en tient aux valeurs d’autonomie et de capacité, on en déduit une consommation d’une quinzaine de KWh aux 100 km.
Avec son chargeur embarqué de 11 kW, l’Ocean ne révolutionne pas la recharge à domicile. En revanche, il peut encaisser jusqu’à 200 kW lorsqu’il est connecté en courant continu à une borne rapide. Fisker prétend que la grosse batterie ne prend ainsi que 33 minutes pour passer de 10 à 80%.
Châssis plus confortable que sportif
L’Ocean propose trois modes de conduite, qui se sélectionnent au volant: «Earth», «Fun» et «Hyper», que l’on peut traduire par Eco, Normal et Sport. La meilleure façon de conduire le Fisker Ocean est sans oute d’opter pour le mode Earth. Pas tant parce que ce mode correspond au «green washing» du constructeur mais plus parce que le châssis n’est que partiellement adapté à la conduite sportive. Avec sa suspension souple, l’Ocean répond aux vitesses trop élevées par un tempérament sous-vireur. Si cela a eu moins l’avantage d’être sûr, ce n’est en tout cas pas très amusant. L’ESP régule de manière rigoureuse les changements de charge rapides, étouffant dans l’œuf toute velléité de dérapage. En revanche, en matière de dynamisme longitudinal, le SUV américain se défend très bien, l’Ocean Extreme étant capable de passer de 0 à 100 en 4,0 secondes. Certes, d’autres font encore mieux mais il n’empêche que derrière le volant, la sensation est brutale. Il faut dire que la transmission intégrale garantit une excellente motricité, l’Ocean étant envoyé vers l’avant comme s’il était attaché à un câble.
Bien qu’elle soit guidée avec précision, la direction est trop assistée pour bien sentir le travail du train avant. Et la jante épaisse du volant ne peut être bien saisie que par les conducteurs dotés de grandes mains. De toute façon, le système d’alerte de franchissement involontaire de ligne de l’Ocean fonctionne si bien que l’on peut vraiment jouer le rôle de surveillant plutôt que de conducteur actif derrière le volant. Du moins, si le reste fonctionne, car lors de notre essai, le régulateur de distance ne s’est absolument pas activé.
Ce n’est pas étonnant, certaines fonctions de conduite autonome, dont le régulateur et l’assistant de changement de voie ne seront pas activées avant la fin de l’année, lorsque Fisker réalisera une mise à jour «over-the-air». S’agissant d’une marque qui (re)démarre, il aurait sans doute été préférable que tout ait été parfait dès le début.
Perspectives passionnantes
Faire attendre les clients ne semblent pas gêner Fisker, qui affirme avoir déjà vendu les 5000 unités de l’édition de lancement «One». Henrik Fisker, a d’ailleurs remercié ses clients par un message vidéo, visionnable dans la voiture. Dans l’Ocean One et l’Ocean Extreme, équipés de la même manière, le toit ouvrant solaire est proposé de série. Il génère suffisamment d’électricité pour parcourir jusqu’à sept km par jour ou 2400 km par an.
Evidemment, cela dépendra surtout de la région où est utilisée la voiture. Cet accessoire n’est pas disponible sur la version d’entrée de gamme «Sport» (qui s’appellera probablement «Winter» chez nous), ni sur la version intermédiaire «Ultra».
Les prix de ces deux modèles n’ont pas encore été communiqués officiellement mais ils devraient s’établir respectivement à 42 000 et 57 000 francs. L’«Extreme», quant à elle est beaucoup plus chère puisqu’elle démarre à 68 990 francs.