La Renault Zoé électrique rose et la Volvo V70 break verte sont lancées à une vitesse d’environ 70 km/h lorsqu’elles entrent en collision frontale. Le choc est violent, le bruit assourdissant, des éclats de verre volent dans les airs et de la fumée s’élève des véhicules. Puis tous deux retombent au sol. Le lieu de l’«accident»: l’aérodrome de Dübendorf, Zurich. Les deux voitures, contenant des mannequins, ont en fait été tractées par une Tesla X – idéale grâce à son accélération progressive – par le biais d’un treuil spécialement conçu pour l’occasion. Elles ont été sacri ées lors d’un crash test organisé par l’assurance automobile Axa, dont les recherches portent sur les véhicules électriques. Le but n’est évidemment pas de divertir le public, mais d’acquérir des connaissances sur les forces et les faiblesses des voitures électriques en cas d’accident. En effet, ces véhicules sont toujours plus nombreux sur les routes: la Suisse en compte actuellement environ 25 000. Selon Bettina Zahnd, responsable Recherche accidentologique et Prévention d’Axa Suisse, elles ne représentent certes que 0,42% de toutes les immatriculations, mais leur nombre connaît actuellement une croissance exponentielle. Le nombre d’accidents impliquant de tels véhicules risque par conséquent également d’augmenter, et le plus grand assureur accidents helvétique – qui depuis 1985 mène, sur les accidents, des recherches d’une ampleur inégalée – compte bien s’y préparer.
Le moment de vérité
Le constat sur le lieu de l’accident est surprenant: les deux véhicules sont déclarés irréparables, toutefois l’habitacle ainsi que le pare-brise de la Zoé sont encore presque intacts, alors que la Volvo, apparemment plus robuste, est entièrement enfoncée. Autrement dit, les passagers de la Zoé s’en seraient probablement sortis avec des blessures moins graves que ceux de la Volvo. Il faut toutefois noter que le break n’était pas un modèle actuel. «Avec une Volvo récente, les résultats seraient certainement différents, car de nombreux progrès techniques ont été réalisés au niveau de la carrosserie ces dernières années», estime Bettina Zahnd. Il n’existe à ce jour aucune statistique représentative du nombre d’accidents impliquant des véhicules électriques. La compagnie d’assurances sait néanmoins que les véhicules de la catégorie micro provoquent environ 10% de sinistres de moins que leurs homologues thermiques, alors que pour les grandes SUV ou les limousines de luxe, les véhicules électriques sont davantage (+ 40%) impliqués dans des accidents que les voitures conventionnelles.
Le problème de la batterie
La Zoé du test n’était pas tout à fait une «vraie» voiture électrique, car il a fallu renoncer aux batteries originales pour des raisons de sécurité. Lorsqu’elles brûlent, ces dernières sont en effet particulièrement dif ciles à éteindre et émettent des fumées toxiques. Elles jouent cependant un rôle essentiel pour la rigidité de la structure. Aussi des répliques de batteries d’environ 300 kilos, en acier et béton, avaient-elles été installées dans le véhicule pour ce test consistant avant tout à véri er la stabilité de la structure d’une voiture électrique et la sécurité des passagers. «La question reste bien entendu de savoir si les airbags s’ouvriront, car les commandes électroniques pourraient être perturbées », avait déclaré Bettina Zahnd avant d’autoriser la séquence d’essai. Finalement, les coussins de sécurité se sont bien déployés.
Sauvetage et dégagement des victimes Comme lors d’un véritable accident, les sauveteurs arrivent sur les lieux: d’abord les ambulanciers, puis les pompiers et en n la remorqueuse. Les ambulanciers parviennent à atteindre assez facilement le conducteur accidenté, car la porte passager de la Zoé s’ouvre encore. Ils peuvent ainsi commencer à stabiliser le patient. «Ce type de situations nécessite de la rapidité et un travail d’équipe ef cace.» Quelques minutes plus tard, les pompiers sécurisent le véhicule selon les prescriptions, enregistrent sur une tablette le type de véhicule et l’emplacement des batteries, des câbles d’alimentation électrique et de l’interrupteur d’urgence, coupent le courant et commencent à travailler munis de gants d’isolation. Ils déposent une couverture de protection sur le compartiment moteur déchiqueté et découpent le montant B avec une pince hydraulique pour faciliter l’accès aux occupants de la voiture.
Le véhicule spécial d’Autohilfe Zürich
Les véhicules électriques accidentés ne peuvent pas être chargés simplement sur une remorque, en raison du risque d’in ammation des batteries. Au vu du nombre croissant d’accidents impliquant des voitures électriques, la «Bergetechnische Vereinigung », fondée il y a un an et composée de 50 membres, a conçu un container spécial d’environ six mètres de long, installé sur une remorque, dans lequel est tirée la voiture accidentée. Dans le container, un dispositif déclenche une alarme si la température atteint environ 100 degrés, puis, vers 400 degrés, s’active en pulvérisant un aérosol grâce à des gicleurs. Si nécessaire, le container peut également être inondé depuis l’extérieur. Le dispositif est employé par Autohilfe Zürich depuis un an. «Nous l’avons utilisé pour quatre accidents graves impliquant des véhicules électriques», indique Fabian Knecht, le directeur de l’entreprise. D’autres containers du même type sont utilisés actuellement dans les cantons d’Argovie, de Thurgovie, de Berne, de Bâle et du Tessin. Conclusion de la journée test à Dübendorf (Zurich): les caractéristiques techniques et le système d’assistance à la conduite des véhicules électriques imposent des exigences élevées aux conductrices et conducteurs, aux autres usagers de la route, mais aussi et surtout aux sauveteurs. Cependant, les véhicules électriques semblent nettement plus stables qu’on ne l’imaginait.