Le cow-boy solitaire

Le Wrangler figure parmi les derniers à disposer d’une construction aussi robuste qu’efficace. Cependant, cela n’a pas empêché Jeep d’en faire un franchisseur moderne en l’électrifiant.

Certaines voitures se reconnaissent même les yeux fermés. Le Wrangler en fait partie. Ses spécificités – comme la possibilité d’enlever le toit, les portières et rabattre le pare-brise – en font un modèle simplement unique en son genre! Unique, comme la puissance cumulée de ce Wrangler hybride rechargeable, la plus élevée disponible en Europe. Il la doit aux deux aides électriques ajoutées à son 4-cylindres turbo, sous la forme d’un alterno-démarreur de 33 kW (45 ch) et d’une machine synchrone à aimants permanents placée en amont de sa boîte de vitesses. Ainsi, au total, ce ne sont pas moins de 380 ch qui animent ce cow-boy, signification du mot «wrangler». Mais, entre sa célérité et son intérieur presque luxueux, perché sur sa selle(rie) en cuir, on se sent davantage comme un jockey à l’hippodrome de Chantilly plutôt qu’un vacher du Kansas. 

Missile incontrôlable

Pour répondre à la question qui titille à l’énoncé de sa puissance, testons sa capacité au sprint. Absurde pour un tel véhicule? Certes, mais cela ne l’empêche pas de réussir étonnamment bien cet exercice. Accrochez-vous, car il vous propulse de 0 à 100 km/h en 6,7 secondes, soit à peine moins que ce que promet Jeep (6,4 s). Le supplément d’énergie fourni par les moteurs électriques sert donc aussi à le rendre plus vif, en plus de le rendre «éco-compatible». En effet, le 2.0 turbo passe de la pire catégorie énergétique (G) à la meilleure (A) après la greffe du système hybride. Un comble… Car il accuse un poids démentiel de près de 2,4 t à vide. En effet, l’hybridation vient encore alourdir la version Rubicon de près de 200 kg par rapport à son équivalent purement thermique. Cela dit, la vigueur de son 4-cylindres permet à lui seul, c’est-à-dire sans aide de l’électricité, de faire oublier la masse.

Ces résultats, dignes d’un cheval de course, contrastent avec son comportement, qui relève plutôt d’un veau. Toutefois, il convient de souligner que nous avons déjà connu pire pour ce genre de véhicule, entendez par-là équipé d’un châssis-échelle. Cela dit, impossible de négocier des virages sans ressentir une forte inertie tendant à envoyer le Wrangler dans le sens opposé de là où l’on souhaite aller. Sans parler de ce qui arrive lorsque la chaussée est humide: le train arrière voudra prendre son indépendance, en allant où bon lui semble. Ceci se doit au couple généreux distribué aux roues postérieures, même en sélectionnant le mode AWD automatique. Celui-ci n’active effectivement l’essieu avant que lorsqu’une perte de motricité est détectée. Or, cela semble laisser le temps à l’arrière de déraper sur route mouillée… Le tableau ne s’améliore pas en ligne droite. Sur autoroute, les corrections constantes sont nécessaires pour maintenir le cap en raison d’une direction trop floue. Il faut dire que les pneus destinés à faire du offroad ne lui facilitent pas la tâche. La ville, non plus, ne sera pas son terrain de jeu favori, comme vous pouvez l’imaginer, à cause de gabarit. 

Presque rien ne lui résiste

Quitte à enfoncer une porte ouverte, nous pourrons en conclure que le Wrangler ne se sent vraiment dans son élément qu’entouré de boue et de cailloux. Emmenons-le donc crapahuter sur les divers obstacles de la piste réservée aux 4×4 du circuit TCS de Lignières (NE). Une colline se dresse devant nous et nous décidons de nous y attaquer sans sélectionner les gammes courtes de la boîte de vitesses. Nous progressons, mais ne voyons plus que le ciel, le long capot obstruant nettement la vision. Grâce à une caméra à lentille autonettoyante, ce qui se trouve devant nous s’affiche sur l’écran central, avec le tracé que prendront les roues pour aider le guidage. Résultat: la pente est avalée avec une facilité déconcertante. Au moment de descendre, il suffit de presser un bouton et de laisser faire l’électronique. L’auto limite sa vitesse à 2-3 km/h et nous ramène à l’horizontale comme si de rien n’était. Vient l’épreuve des rondins, lors de laquelle nous déconnectons électroniquement la barre stabilisatrice avant via un bouton. Ça se corse! Bringuebalés dans tous les sens, nous butons sur l’un des morceaux de bois. Les roues patinent, mais une petite marche arrière et un peu d’élan viennent à bout de l’obstacle. Tentons de nouveau de le mettre en difficulté en passant un faux gué. Peine perdue cette fois-ci, où l’eau arrive à peine à la cheville de l’intrépide aventurier, paré pour affronter jusqu’à 76 cm de profondeur. Bref, tout cela ne fut qu’une promenade de santé pour lui.

Conso non pas réduite, mais divisée

L’avantage de l’électrique dans ce type de situation semble évident: plus de couple tout en silence. Il ne faudra toutefois pas avoir trop chaud, car la climatisation fera tourner le moteur thermique. Malgré tout, c’est bien sur la route que l’hybridation se révèle utile afin de réduire la consommation. En moyenne, nous avons mesuré une «soif» de 11 l/100 km lorsque les batteries sont à plat. Or, cette valeur se divise par deux lors de notre parcours standard accus pleins: 5,5 l/100 km (ainsi que 16,8 kWh)! Si le chiffre n’est pas aussi bas que promis par Jeep (4,1 l), cela reste impressionnant. 

Parmi les points positifs de la technologie 4xe appliquée au Wrangler, nous pouvons citer sa possibilité effective de rouler une quarantaine de kilomètres en tout-électrique, même en partie à des vitesses autoroutières, comme nous avons pu le vérifier. En outre, du fait de la position de la batterie sous la banquette, le coffre ne perd pas trop de volume et les transitions entre électrique et thermique se passent généralement sans encombre. En revanche, du côté des points faibles, certaines transitions provoquent parfois quelques petits à-coups, surtout à basse vitesse et il arrive que le 2.0 turbo «reprenne la main» en partant trop haut dans les tours. Aussi, le mode Hybrid (car il y a aussi la possibilité de forcer le fonctionnement soit en thermique, soit en électrique) tendra à vider la batterie. Cependant, un bouton permet de régénérer davantage lors de la décélération.

Un habitacle où il fait bon vivre

Bien que la version 4xe du Wrangler n’apporte pas énormément de changements à l’intérieur, il est nécessaire de rappeler à quel point ce dernier paraît soigné pour la catégorie des vrais utilitaires. Dans notre voiture de test, le cuir recouvrait les confortables sièges ainsi que la planche de bord. L’ensemble est plaisant, robuste et moderne. 

En revanche, l’ergonomie laisse à désirer, avec un trop grand nombre de boutons, dont certains sont même cachés par le volant. A leur décharge, ils peuvent être actionnés avec des gants, ce qui représente un avantage à l’ère du tout-tactile. D’autres bémols ont été constatés, tel le manque de repose-pied pour le conducteur ou la «marche» encombrante pour charger des objets que forment les dossiers rabattus. En outre, le bruit est assez présent à l’intérieur en raison de la carrosserie peu aérodynamique et des pneus Mud Terrain. Notons encore des lacunes du côté de la sécurité. En effet, malgré certaines aides à la conduite (régulateur de vitesse adaptatif ou l’avertissement de collision), d’autres manquent (maintien de voie notamment) et il obtient ainsi la note de 1/5 au test de l’Euro NCAP (en 2018 avec un modèle 2.0 Sahara). 

Ce Wrangler conserve son statut d’authentique voiture-plaisir et a le mérite de faire partie des derniers à proposer une transmission intégrale permanente avec différentiel central. Ce vrai 4×4 a su rester un vrai baroudeur, malgré la modernisation électrique. A équipement équivalent, la différence de prix de la version hybride rechargeable ne se monte qu’à 5000 Fr, mais s’élève à 15 000 Fr. par rapport à la finition de base nommée Sport. Cet écart nous semble alors difficile à justifier, car l’hybridation n’améliore pas sensiblement les qualités de l’auto, que ce soit sur route ou sur piste 

Nous remercions le centre de conduite du TCS à Lignières (NE) de nous avoir prêté sa zone pour 4×4. www.tcs.ch

RÉSULTATS

Note de la rédaction 74.5/100

moteur-boîte

La 4-cylindres pousse fort et l’adjonction de machines électriques rend l’ensemble encore plus performant. La possibilité de rouler sans brûler d’essence jusqu’à 120 km/h sur une longue distance est appréciable.

trains roulants

Tout à fait adaptés aux conditions extrêmes, les trains roulants sont un peu plus à la peine sur la route. Il se comporte de façon pataude et peu précise, mais toujours dans un bon confort.

Habitacle

La finition agréable à l’œil et au toucher est appréciée, tout comme la style et l’ambiance typiques. En revanche, l’ergonomie déçoit un peu.

Sécurité

Avec une note d’une étoile sur cinq au test de l’EuroNCAP, le Wrangler n’a pas brillé en 2018. Certaines assistances manquent à l’appel, mais il y en a tout de même plusieurs, qui ont bien fonctionné lors de l’essai.

Budget

Le prix de base de la version PHEV à 76 490 Fr. n’est pas donné et les options (dont le toit en dur dès 3000 Fr.) alourdissent encore la note. Mais les économies de carburant sont réelles.

Verdict 

Jeep est arrivée à électrifier son fleuron sans lui faire perdre ses spécificités et en conservant son capital sympathie. Cependant, si l’intégration du système hybride et son fonctionnement sont réussis, cela n’en fera pas un véhicule plus adapté aux milieux urbains. 

Vous trouverez le fiche technique de ce modèle et les mesures effectuées par la RA dans la version imprimée et dans le e-paper.

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