Les fins d’années sont toujours le moment des bilans, car on a enfin une vue d’ensemble sur tout ce qui a été accompli au cours des mois écoulés. On peut mettre les choses en perspective, on a le recul nécessaire. Dans notre cas, le bilan fait état de 96 voitures essayées, mesurées et évaluées dans les détails, sans préjugés ou préférences personnelles.
En 2022 encore, force est de constater que les voitures sportives ont volé la vedette, en s’adjugeant huit places du top 10. Difficile de nier face à cette évidence que l’exclusivité d’une Ferrari, les vibrations d’un cinq-cylindres en ligne ou le son flat-six laissent nos testeurs de marbre. Toutefois, est-ce que cela est fondamentalement faux? Nous ne le pensons pas: même si peu l’admettent ouvertement, l’automobile appelle toujours à une part irrationnelle de soi. Que ce soit pour la femme au foyer qui va faire ses courses avec sa Fiat 500, le jardinier qui transporte son matériel avec son VW Amarok ou la banquière qui flâne avec sa 911, la voiture est bien plus qu’une ou deux tonnes d’acier sur quatre roues. Ils aiment tous leur véhicule, lui font confiance et lui donnent peut-être un petit nom.
Au jeu des émotions, les voitures de sport gardent une longueur d’avance; c’est elles qui font rêver, ce sont elles qui déchaînent les passions, elles se retrouvent ainsi surreprésentées dans notre classement. Pourtant, chaque modèle testé peut en théorie être parmi les meilleurs, qu’ils aient une poignée de chevaux ou une entière cavalerie à disposition. Chaque type d’auto dispose d’une grille d’évaluation qui lui est propre, avec des critères pondérés en fonction de leur pertinence pour le segment. Le prix sera ainsi plus important pour une citadine que pour une sportive. Toutefois, ce que le classement ne dit pas, c’est qu’il n’y a plus de mauvaise voiture de nos jours. Cette expression est bien sûr aussi vieille que l’automobile elle-même, raison pour laquelle il ne faut pas lui accorder trop d’importance. La voiture à moteur thermique approche de son apogée en termes de développement et sera bientôt supplantée par des machines électriques, selon le voeu de la communauté européenne, qui a fixé la fin du thermique pour 2035. Même du côté du châssis, les innovations se font par petits pas; les constructeurs préfèrent allouer davantage de ressources à l’élaboration des logiciels et de l’électronique. Ainsi, avant que le monde que nous avons connu tire sa révérence, nous nous accrochons aux émotions, aux sons, aux vibrations, aux performances et au comportement routier des voitures contemporaines. Assez d’explications, et place aux voitures qui ont marqué l’année 2022 de la Revue Automobile.
BMW M3 Competition, Note de la RA 86
La BMW M3 polarise le monde de fans d’auto. Peu importe, quand on en vient aux faits, la bavaroise déroule des arguments difficiles à contester. On pense à son six-cylindres en ligne, qui convient toujours aussi bien à cette sportive, ou à sa fabuleuse transmission intégrale. Ce système 4×4 augmente la polyvalence de la M3, capable de rouler en toute sécurité dans la neige ou de se lancer des dérives endiablées sur circuit. Tout cela vient avec un prix, littéralement, car la berline est devenue chère. Son poids aussi paye le tribut à toute cette technologie, car la M3 est devenue grande et lourde. Elle est aussi peut-être moins radicale que par le passé, et l’arrivée d’une version break le démontre. C’est peut-être pour cette raison qu’elle fait partie des meilleures sportives adaptées à un usage quotidien.
Porsche Cayman GT4 RS, Note de la RA 85
La Cayman GT4 RS serait-elle meilleure qu’une 911 GT3? Peut-être, car le petit coupé dispose de certains atouts niés à la 911, comme un moteur central. Cette disposition idéale se remarque dans les virages, la voiture semblant pivoter autour de son axe à l’accélération. Ses dimensions compactes la rendent aussi plus agile que la 911 GT3 RS, qui est devenue de plus en plus grande. La Cayman lui chipe d’ailleurs son moteur six cylindres à plat, un petit bijou dont les bruits d’aspiration s’entendent comme sur aucune autre voiture. Le collecteur d’aspiration est en effet à quelques centimètres des oreilles du conducteur. Le prix est élevé, mais le plaisir de conduire l’est tout autant.
Bentley Continental GTC Speed, Note RA 84.5
La Bentley Continental GTC n’est pas pour tout le monde, et pas seulement en raison de son prix de 250 000 francs. L’anglaise est en effet une anticonformiste, prenant à contre-courant l’électrification galopante en vogue, avec son énorme W12 de 6 litres. Cette cathédrale mécanique a d’ailleurs joué un grand rôle pour la note et, dès lors, dans le classement final de la Bentley Continental GTC Speed dans notre palmarès. La puissance débordante et le couple monstrueux du groupe motopropulseur parviennent à souffler le poids conséquent de la britannique de façon impressionnante. A 1700 tr/min à peine, le W12 déploie toute sa force colossale, mais toujours avec un flegme tout britannique.
Ferrari 296 GTB, Note de la RA 84
C’est sûr, il fallait garder la tête froide: la perspective d’une Ferrari électrifiée n’était pas réjouissante, et on risquait de la condamner sans jugement. Toutefois, la rédaction a longuement débattu sur la 296 GTB et a su s’en tenir aux faits. Là, la berlinette à moteur V6 3 litres uni à une machine électrique a sidéré les testeurs, tant l’union entre les deux propulseurs se fait dans une parfaite harmonie et produit une poussée sensationnelle à chaque régime. Le châssis est au diapason, et ne souffre pratiquement pas du poids additionnel imputable au groupe motopropulseur hybride; le conducteur ne semble faire qu’un avec la voiture, c’est là la signature typique des Ferrari.
Hyundai Tucson, Note de la RA 84
Grâce à sa variante hybride rechargeable, le Tucson coréen ajoute une nouvelle corde à son arc. Il dispose d’une base technique solide, en raison de ses 265 chevaux et une autonomie électrique atteignant 50 kilomètres en conditions réelles. La transmission intégrale, chérie des Suisses, est de la partie, tandis que l’intérieur ne souffre d’aucun défaut grave. On apprécie aussi que le SUV asiatique fonctionne toujours comme une propulsion hybride, même batterie déchargée. Le design sera une affaire de goûts et paraîtra sans doute démodé dans quelques années, mais l’apparence joue un rôle secondaire sur ces véhicules à vocation pratique. Le prix est en revanche bien plus important, et là, Hyundai se montre convaincant.
Porsche Cayenne Turbo GT, Note de la RA 84
Il ne faut même pas en discuter. Oui, le Cayenne Turbo GT ne sert à rien, tout comme les autres SUV coupés bodybuildés. Pourtant, les chiffres de ventes des Audi RS Q8, Lamborghini Urus et BMW X6M prouvent qu’il existe une demande pour ce type de véhicules, donnant raison à ces constructeurs. Porsche l’a bien compris et a décidé de marquer son territoire en arrivant un monstre de 640 chevaux. Et le V8 explosif n’est que le début des réjouissances du grand SUV de Zuffenhausen, car les trains roulants font honneur à la tradition de Porsche en la matière. Il porte, après tout, le noble badge GT. Les finitions impeccables flatteront enfin les occupants, ce qui ne gâche rien.
Cupra Formentor VZ5, Note de la RA 83.5
Dans le groupe Volkswagen, on partage tout, de la plateforme au levier de clignotants, en passant par les moteurs et les boîtes. Il y a quelques exceptions à cette règle, à l’instar du cinq-cylindres en ligne, qu’Audi garde jalousement pour elle. La marque d’Ingolstadt a concédé toutefois 7000 exemplaires de son petit bijou à disposition de Cupra, pour le Formentor VZ5. Les Espagnols se sont ensuite chargés du comportement routier du SUV, qu’ils ont su rendre joueur, grâce notamment à un différentiel à glissement limité, qui incorpore un mode dérive. Le style et l’aura plus décontractée du Formentor, par rapport à une Audi, parachève l’œuvre: le SUV se montre irrésistible.
Kia EV6, Note de la RA 83.5
Notre classement n’aurait pas été très crédible si la Kia EV6 n’y figurait pas en bonne position. La marque coréenne est d’ailleurs très fière de son véhicule électrique, qui a été élu Voiture de l’année en 2022. Notre test approfondi a mis en lumière toutes les qualités de l’EV6, qui apporte dans les segments inférieurs des technologies réservées généralement aux catégories supérieures. Nous pensons à l’architecture 800 volts, la puissance de recharge de 240 kW, la faible consommation et une grande autonomie. Kia a ainsi signalé à la concurrence de quel bois elle se chauffait, surtout dans sa variante GT – toujours indisponible sur le marché – forte de 585 chevaux.
Hyundai Santa Fe PHEV, Note de la RA 83
70 000 francs et plus pour une Hyundai, cela peut paraître beaucoup d’argent. Toutefois, la marque coréenne offre énormément, en termes d’espace et d’équipement, pour ce prix. Hyundai est parvenue à préserver l’habitabilité et le volume de coffre en cachant les batteries du système hybride sous les sièges avant. Le Santa Fe a un autre atout dans son coffre, à savoir les deux sièges escamotables dans le plancher; rares sont les SUV de cette catégorie à proposer sept places. Surtout à ce prix! Il faut en effet «taper» dans les concurrents premium pour trouver telle caractéristique. On apprécie aussi la finition, plutôt flatteuse, et la politique d’options, ou la liste des extras se limite à quelques points.
Porsche 911 Carrera GTS, Note de la RA 83
Quoi, encore une Porsche? Oui, encore une. Il faut se souvenir que la 911 existe en plus de trente variantes, elle multiplie forcément les chances d’atterrir dans notre classement. Porsche décrit les déclinaisons GTS comme une sorte de «meilleur des deux mondes», à réussisant la quadrature du cercle entre sportivité et confort. Habituellement, nous n’accordons pas d’importance à ces promesses du marketing, mais force est de constater que c’est vrai pour la Carrera GTS. Son prix, fixé à 200 000 francs, n’en fait pas une proposition accessible à la plupart, mais c’est déjà le cas de la 911 de base. Pourtant, le coupé allemand se vend comme des petits pains.
Nos autos d’essai vues en coupe
Elles ont été 95 cette année à avoir passé entre les mains des essayeurs de la Revue Automobile, en 2022. La plupart des voitures testées ont été soumises à nos habituelles mesures d’accélération, de freinage et de consommation; pour une minorité d’entre elles, il n’a pas été possible d’effectuer ces relevés, en général à cause du mauvais temps. Le choix des voitures qui finiront dans notre parc de test pose toujours une question d’équilibre. L’idée est d’avoir un panel d’autos représentatives du marché, entre nationalité de la marque, prix des voitures et puissance – sans oublier une dose de passion. Voici la composition de notre parc d’essai d’essai, en 2022.
Si l’on considère le prix de toutes les voitures testées en 2022, la médiane se situe à 64 040 francs. Il s’agit du prix incluant les équipements optionnels – sur lesquels les importateurs ne lésinent jamais: ils nous livrent généralement des voitures «toutes options», pour nous démontrer de quoi leurs modèles sont capables. Si l’on fait abstraction de ces extras et que l’on considère le prix de base, la médiane tombe alors à 52 700 francs. La fourchette de prix s’étend de 21 640 francs pour la Dacia Spring à environ 340 000 francs à l’autre extrémité; le titre officieux de la voiture la plus chère testée par la RA en 2022 est partagé par la Bentley Continental GTC Speed et la Ferrari 296 GTB.
Sans surprise, on retrouve ce grand écart aussi dans l’éventail des puissances. Au bas de l’échelle, on retrouve la Dacia Spring, avec ses 33 kW (45 ch). Toutefois, les cavaleries s’emballent après la Spring, puisque la Toyota Aygo X est la seule autre proposition testée en 2022 qui a moins de 100 chevaux. A l’autre bout de la hiérarchie, on retrouve les 830 chevaux de la Ferrari 296 GTB. L’Italienne partage le podium avec les Bentley Continental GTC Speed (660 ch) et Porsche Cayenne Turbo GT (641 ch). Lorsqu’on regarde au milieu de l’échelle, on tombe sur une puissance médiane de 224 chevaux. Cette valeur est légèrement supérieure à la puissance moyenne des voitures neuves vendues en Suisse en 2021: la cavalerie moyenne s’élevait alors à 202 chevaux.
Sur les 95 véhicules testés, près de 19% étaient électriques. En regardant dans les statistiques de ventes, on s’aperçoit que leur part de marché s’est élevé à 16% en 2022 en Suisse, soit à quelques pourcent près. Côté nationalité, on remarque que les voitures allemandes ont été très représentées parmi les voitures essayées, avec 38%; les japonaises suivent avec 18%, les coréennes avec 12%, tandis que les françaises représentaient 10% des autos testés. Lorsqu’on compare ces valeurs aux chiffres de vente de l’année 2022, on remarque même que les marques allemandes ont été sous-représentées parmi les voitures essayées par la RA: les autos germaniques se sont en effet accaparées 44% des ventes en 2022. Les voitures japonaises ont obtenu 13% du marché, les coréens prenaient 6,5% des préférences, contre 8% pour les constructeurs français.