Le président central de l’Union professionnelle suisse de l’automobile (UPSA), Urs Wernli, explique à la Revue Automobile comment le secteur automobile tente de s’en sortir en cette période marquée par la fermeture des showrooms. Il nous explique aussi l’impact du coronavirus sur la formation et les apprentis.
Revue Automobile: Sur quels points les restrictions liées au coronavirus sur le secteur de l’automobile font-elles le plus mal?
Urs Wernli: La fermeture des showrooms jusqu’à fin février 2021 est un coup dur pour les garagistes. Nous devons hélas nous attendre à un nouvel effondrement du marché, car les ventes en ligne ne peuvent en aucun cas remplacer les opérations en concession. Vendre des voitures est très important pour les concessionnaires. Le chiffre d’affaires, réalisé avec les services et les réparations, ne compense que partiellement la chute des ventes, mais ne les remplace en aucun cas.
Les grandes enseignes s’en sortent-elles mieux que les petites?
Les garages qui ont mis la priorité sur les opérations en atelier sont moins affectés par la fermeture des salons d’exposition. Les grands concessionnaires, plus orientés vers la vente de véhicules, ressentent plus violemment la baisse du chiffre d’affaires.
Le «chat» en direct avec un vendeur pour l’achat d’une voiture est-il un moyen de faire repartir les ventes?
Le chat en direct est un bon instrument, mais trop peu de clients l’utilisent.
Le chômage partiel est-il envisagé dans votre secteur?
Oui, en particulier pour les conseillers-vendeurs spécialisés dans les voitures neuves.
Dans une lettre adressée au conseiller fédéral Alain Berset, l’UPSA a exigé la réouverture des showrooms. Pourquoi les autorités refusent-elles catégoriquement cette possibilité, qu’est-ce qui fait barrage à une réouverture?
En fermant les magasins, le Conseil fédéral a voulu réduire le nombre de contacts et, par conséquent, les contaminations potentielles. Les entretiens, par contre, peuvent se dérouler en ligne. Je me demande pourquoi un courtier en assurances, un agent immobilier ou un professionnel du même type a le droit, sur rendez-vous, de mener des entretiens dans ses bureaux, chez lui ou chez le client.
Selon l’Office fédéral de la statistique (OFS), les nouvelles immatriculations de voitures ont chuté de près de 24% en 2020 par rapport à l’exercice précédent. Janvier 2021 s’inscrit dans la même lignée. Voyez-vous le bout du tunnel?
Si la pandémie ralentit, on assistera certainement à un effet de rattrapage sur les choses auxquelles les gens renoncent aujourd’hui. Reste à savoir si l’achat d’une voiture neuve figurera en haut de la liste des priorités, au moment du retour à la normale; il est permis d’en douter. J’attends un retour des chiffres de vente normaux au plus tôt à partir de 2022-2023. C’est ce que disent aussi les observateurs de la conjoncture du BAK (Groupe de travail bâlois pour l’étude de la conjoncture) Economics avec lesquels nous coopérons.
Contrairement aux voitures neuves, les ventes de véhicules d’occasion ont été bonnes l’an dernier. Comment expliquez-vous cette popularité?
La voiture a connu un regain de popularité en raison de la crainte de contamination dans les transports en commun. Les bonnes occasions sont recherchées, car elles sont disponibles immédiatement, elles ont été bien entretenues et elles sont vendues à des prix compétitifs.
Quelle est la part du car-sharing dans le chiffre d’affaires des garagistes?
C’est une tendance, mais elle ne pèse pas de façon décisive sur le chiffre d’affaires des garagistes.
Les voitures électriques ont vu leurs immatriculations augmenter de 50% et de presque 79% pour les hybrides en 2020. Cette tendance va-t-elle se poursuivre, ou bien a-t-on besoin d’abord d’étendre le réseau de bornes de recharge?
Cette tendance va se poursuivre. Bien que les voitures électriques ne sont plus considérées comme vraiment écologiques, elles restent en vogue. Presque tous les constructeurs proposent des modèles intéressants, à l’autonomie toujours majorée; leur diversité augmente. Ces clients apprécient aussi les possibilités offertes par les systèmes inforécréatifs modernes, qui les accompagnent souvent. L’extension du réseau de bornes de recharge donnera un coup de fouet à cette vague. Et, n’oublions pas les incitations fiscales pour les utilisateurs de voitures électriques.
Au milieu des difficultés actuelles engendrées par la pandémie de coronavirus, quel soutien concret l’UPSA peut-elle apporter à ses membres?
La task force «corona» de l’UPSA est en contact quotidien avec les membres et les décideurs, les autorités et les fédérations partenaires. Nous avons déjà obtenu de bons résultats grâce aux contacts réguliers avec les autorités: l’OFSP (l’Office fédéral de la santé publique) a, par exemple, autorisé les vendeurs à donner des explications à propos d’une voiture, en plein air. De même, nos spécialistes ont élaboré les mesures de protection, qui sont aujourd’hui appliquées dans les ateliers et stations de lavage. Ces explications sont disponibles sur notre site internet.
La pandémie de coronavirus affecte aussi la formation initiale et continue. Comment l’Union professionnelle suisse de l’automobile réagit-elle face à cette situation? Comment soutient-elle les jeunes professionnels? La recherche de postes d’apprentissage dans l’industrie automobile est-elle entravée par les restrictions liées au coronavirus?
Pour la formation initiale, nous nous engageons sans relâche pour que les cours interentreprises puissent être dispensés aux apprenants et pour que les leçons en écoles professionnelles aient toujours lieu. Le fait que les garages restent ouverts garantit que tous les apprentis des professions de l’automobile continuent de recevoir la formation nécessaire. Pour la formation continue, les examens sont maintenus grâce au respect des mesures de protection mises en place. Les stages et les cours quotidiens se déroulent en distanciel. Par rapport aux années précédentes, l’offre de postes d’apprentissage n’a pas changé, heureusement! Le processus de recrutement accuse un léger retard étant donné que les entreprises font, pour certaines, preuve de prudence pour l’ouverture de stages de découverte.
Sur le site métiersauto.ch, nous avons mis en ligne des outils pour découvrir en ligne les professions de l’automobile. Ainsi, tout écolier intéressé peut-il s’informer sur nos métiers, en particulier par vidéo, en attendant de pouvoir faire un stage de découverte dans une entreprise du secteur. Les jeunes peuvent aussi accomplir le test d’aptitude de l’UPSA dans toute la Suisse, malgré la situation actuelle.